Assemblée nationale XVe législature Session
ordinaire de 2019-2020
Compte rendu intégral
Troisième séance du dimanche 23 février 2020
SOMMAIRE
Présidence
de M. Richard Ferrand
1.
Système universel de retraite
Discussion
des articles (suite)
Article 1er
(suite)
Amendements nos 10915
, 42318
(sous-amendement)
M. Nicolas
Turquois, rapporteur de la commission spéciale
M. Olivier
Véran, ministre des solidarités et de la santé
Amendements nos 3941
, 4004,
4006, 4007, 4009, 4010, 4012, 4014, 4015, 4018, 4019, 4021, 4023, 4025, 4027,
4031, 4033, 4034 , 2551
, 42431
(sous-amendement) , 42112,
42111, 42113, 42110, 42114, 42115, 42116 (sous-amendements) , 42427
(sous-amendement) , 11373
, 22700
, 42532
, 23853
, 24533
, 27401
, 32963
, 26727,
28105, 28106, 28107, 28108, 28109, 28110, 28111, 28112, 28113, 28114, 28115,
28116, 28117, 28118, 28119 , ,
42433,
42435 (sous-amendements)
Suspension
et reprise de la séance
Rappel
au règlement
M. Olivier
Faure
Article 1er
(suite)
Amendements nos 26729,
28074, 28075, 28076, 28077, 28078, 28079, 28080, 28081, 28082, 28083, 28084,
28085, 28086, 28087,, 28088 , 42441,
42442 (sous-amendements) , 26730,
28059, 28060, 28061, 28062, 28063, 28064, 28065, 28066, 28067, 28068, 28069,
28070, 28071, 28072, 28073 , 42448
(sous-amendement)
Rappel
au règlement
M. Olivier
Faure
M. le
président
Suspension
et reprise de la séance
M. le
président
M. Olivier
Faure
Article 1er
(suite)
Amendements nos 26984,
26985, 26986, 26987, 26988, 26989, 26990, 26991, 26992, 26993, 26994, 26995,
26996, 26997, 26998, 26999 , 42456,
42454 (sous-amendements) , 27000,
27001, 27002, 27003, 27004, 27005, 27006, 27007, 27008, 27009, 27010, 27011,
27012, 27013, 27524, 27525 , 42457,
42458 (sous-amendements) , 27526,
27527, 27528, 27529, 27530, 27531, 27532, 27533, 27534, 27535, 27536, 27537,
27538, 27539, 27540, 27541 , 42469,
42470 (sous-amendements) , 23854
, 42024
(sous-amendement) , 42025,
42026, 42027 (sous-amendements) , 42472
(sous-amendement) , 42028,
42029 (sous-amendements) , 42360
(sous-amendement) , 42031
(sous-amendement) , 42471
(sous-amendement)
2.
Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de
M. Richard Ferrand
M. le
président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
1
Système universel de retraite
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le
président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet
de loi instituant un système universel de retraite (nos 2623
rectifié, 2683).
Discussion des articles (suite)
M. le
président. Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles
du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 10915 à
l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. le
président. Je suis saisi d’un amendement no 10915, qui
fait l’objet d’un sous-amendement no 42318.
La parole est
à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement.
M. Thierry
Benoit. Je suis convaincu que le système universel de retraite par
points préserve le système par répartition. On passe simplement d’un calcul par
trimestre à un calcul par points.
M. Roland
Lescure. C’est vrai !
M. Thierry
Benoit. Par cet amendement, le groupe UDI, Agir et indépendants propose
d’inscrire, à l’article 1er, parmi les objectifs assignés au
système universel de retraite : « Un objectif de confiance des jeunes
générations dans la garantie de leurs droits à retraite futurs. »
À
mon sens, la question de la solidarité entre les générations constitue le
véritable enjeu du système de retraite. Les jeunes de notre pays sont en droit
de se demander si, dans vingt, trente ou quarante ans, ils bénéficieront d’une
retraite, si le système est pérenne, et si le financement des pensions des
retraités par les actifs restera notre modèle.
En définissant un tel
objectif, nous envoyons un signal à la jeunesse, et je ne pense pas uniquement à
ceux qui sont nés en 2004 ou depuis 1975, car je considère que quelqu’un de plus
jeune que moi est jeune – j’ai 50 ans. (Sourires sur plusieurs
bancs.)
M. Roland
Lescure. Mais vous êtes jeune, monsieur Benoit !
M. Thierry
Benoit. Il est donc essentiel d’inscrire dans le projet de loi
l’objectif de solidarité envers les jeunes générations.
M. le
président. La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le
sous-amendement no 42318.
M. Thibault
Bazin. L’amendement de notre collègue Thierry Benoit a le mérite de
lancer un véritable défi. La confiance des jeunes actifs dans notre système de
protection est en effet essentielle au pacte social.
Le sous-amendement,
dont un collègue breton est le premier signataire (Sourires), vise à
définir plus précisément les générations concernées en remplaçant les mots
« jeunes générations » par les mots « générations nées à compter
du 1er janvier 2004 ».
Vous avez vous-même choisi,
par ce projet de loi, de diviser les Français en trois générations. Il y aura la
génération de ceux qui sont nés avant le 1er janvier 1975, celle
de ceux qui sont nés entre le 1er janvier 1975 et le
31 décembre 2003, et puis tous les autres, nés à compter du
1er janvier 2004. On peut d’ailleurs s’interroger sur des choix
dont découle un traitement différencié selon que l’on appartient à la génération
1960, à la génération 1965, à la génération 1975 ou à la génération 1980.
Certains agents de maîtrise de la SNCF et de la RATP pourront par exemple
prendre leur retraite à 57 ans ; les conducteurs de la SNCF et de la
RATP de la génération 1985 pourront liquider leur pension à 52 ans :
on peut se demander si on ne risque pas des conflits de générations.
M. Fabien
Roussel. Ah ça, des conflits, il va y en avoir !
M. Thibault
Bazin. Alors que notre pays a tant besoin de renforcer sa cohésion
sociale, sa cohésion territoriale et la cohésion entre les générations, les plus
jeunes finiront-ils par payer la dette que l’absence de financement équilibré va
créer ? Nous avons besoin de confiance. C’est pourquoi il faut soutenir
l’amendement de notre collègue Thierry Benoit.
M. le
président. La parole est à M. Nicolas Turquois, rapporteur de la
commission spéciale pour le titre Ier, pour donner l’avis de la
commission sur l’amendement et le sous-amendement.
M. Nicolas
Turquois, rapporteur de la commission spéciale. De nombreuses
enquêtes ont montré la défiance des jeunes envers le système actuel et leur
certitude qu’ils n’en bénéficieraient pas eux-mêmes, alors qu’ils doivent y
contribuer tout en se trouvant souvent dans des situations financières moins
favorables que celles de leurs aînés.
En conséquence, il me semble
important d’introduire dans le texte l’objectif de confiance des jeunes
générations et, pour cela, d’adopter un amendement que la commission spéciale a
accepté lors de la réunion qu’elle a tenue en application de l’article 88
du règlement.
En revanche, je veux réagir aux propos de notre collègue
Thibault Bazin selon lesquels on diviserait nos concitoyens en plusieurs
générations. Ce n’est pas vrai ! Tout d’abord, il y a bien une approche
unique dans la mesure où le système de retraite universel ne s’appliquera pas à
ceux qui sont à moins de dix-sept ans de l’âge légal de départ – soit
62 ans pour le régime général, mais 57 ans ou 52 ans dans
d’autres régimes. Il s’agit d’une règle unique et universelle.
Par
ailleurs, pour ne pas rompre avec ce principe d’unité alors que nous changeons
de système, nous avons prévu des périodes de transition longues.
En bref,
je répète que je suis très favorable à l’amendement de M. Benoit et de ses
collègues, car il faut donner du sens à l’idée de nation et que les jeunes sont
les premiers à l’incarner. Je suis en revanche défavorable au sous-amendement
soutenu par M. Bazin et ses collègues.
M. le
président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la
santé, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. Olivier
Véran, ministre des solidarités et de la santé. Je partage l’avis
de M. le rapporteur.
L’amendement est frappé au coin du bon sens.
L’objet principal de la réforme des retraites est de recréer les conditions de
la confiance des jeunes générations envers notre système social. Il n’y a rien
de plus triste qu’un système social auquel on ne croit pas. En l’espèce, si les
jeunes n’y croient pas, ce n’est pas qu’ils ne l’aiment pas ; c’est qu’ils
le jugent trop fragile.
Conforter le système par répartition, créer de
nouveaux droits et un système universel plus juste, c’est donc précisément
permettre aux jeunes générations de cotiser en toute confiance en étant
certaines que l’argent leur sera reversé d’une manière ou d’une autre, dans les
meilleures conditions possibles, lorsque le moment sera venu de cesser leur
activité professionnelle.
M. le
président. La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe
Vigier. Bien naturellement, le groupe Libertés et territoires votera en
faveur de l’amendement de Thierry Benoit. En revanche, nous ne voterons pas le
sous-amendement, car nous estimons son approche un peu restrictive. Comme vient
de l’expliquer M. le ministre, l’important, c’est de redonner confiance aux
jeunes générations.
Un sondage d’un grand institut montrait, il y a
quelques jours, que 81 % des jeunes n’ont aucune confiance dans notre
système de retraite. Cela doit tous nous amener à réfléchir.
M. Hervé
Saulignac. Cette disposition n’y changera rien !
M. Philippe
Vigier. Hier, nous avons vécu un moment d’harmonie dans l’hémicycle pour
adopter un amendement relatif aux aidants familiaux ; cet après-midi, il
s’est reproduit s’agissant de l’objectif de « garantie d’un niveau de vie
digne » pour les retraités. Nous devrions recommencer ce soir pour nous
accorder sur l’objectif de confiance des jeunes générations : il faut
franchir cette étape ensemble.
M.
Jean-Jacques Bridey. Très bien !
M.
Dominique Potier. C’est de la pensée magique !
M. le
président. La parole est à M. Thierry Benoit.
M. Thierry
Benoit. C’est bel et bien un système universel de retraite que l’on nous
propose. Il est universel, car il programme l’extinction des régimes spéciaux.
Il est universel parce qu’il organise la convergence des retraites du public et
du privé. Il est enfin universel parce qu’il confirme la solidarité entre les
générations, en particulier à l’égard des jeunes.
Monsieur le président,
même si ce n’est pas notre pratique dans cet hémicycle, permettez-moi de
m’adresser à Thibault Bazin, qui est un jeune et bon député.
(« Ah ! » et
applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M.
Dominique Potier. Écoute, Thibault !
M. Thierry
Benoit. Cher collègue, la société française a besoin de cohésion. Je
regrette que le sous-amendement de M. Marc Le Fur, que vous avez
soutenu, laisse entendre qu’aujourd’hui ne sont comptés parmi les jeunes que
ceux qui sont nés après le 1er janvier 2004. Je crois que c’est
une erreur.
Je suggère à notre collègue de retirer un sous-amendement qui
limite la portée d’un amendement soutenu par le Gouvernement et par des députés
comme Philippe Vigier. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-Agir,
LaREM, MODEM et LT.)
M. le
président. La parole est à Mme Clémentine Autain.
Mme
Clémentine Autain. Pourquoi les jeunes n’ont-ils pas confiance dans
notre système de retraite ? Cela s’explique notamment par le fait que
l’argument selon lequel ce système serait insoutenable et en faillite est
largement repris, dans les grands médias comme par un certain nombre d’hommes et
de femmes politiques reprennent largement.
M. Bruno
Millienne. Peut-être ne l’affirment-ils pas sans raison !
Mme
Clémentine Autain. Les jeunes générations se disent d’autant plus que le
système n’est pas tenable qu’elles constatent le caractère inéluctable de
politiques qui détricotent les droits et les protections. Le défaut de confiance
ne concerne pas uniquement le système de retraite ; il s’agit d’abord d’un
manque de confiance à l’égard de la politique, et de sa capacité à améliorer les
conditions d’existence et à garantir des droits et des protections pour
l’avenir.
L’objectif fixé à un régime de retraite de redonner confiance
aux nouvelles générations est bon, mais je ne vois pas comment il pourrait être
atteint dans le cadre de ce projet de loi. En effet, ce dernier ne précise pas à
quelle échéance l’âge d’équilibre sera modifié : on ne le sait pas. La
confiance est donc rompue dès lors qu’en la matière la règle est mouvante. Sans
règle fixe et qui s’applique de droit, les droits ne sont pas
garantis.
Quant à l’équilibre financier et à la pérennité des protections
du système, ils ne sont pas davantage garantis puisque l’on n’y voit absolument
pas clair.
En conséquence, si je suis favorable au principe défendu par
l’amendement, je suis défavorable car le projet de loi ne permettra pas
d’obtenir la confiance des jeunes générations.
M. le
président. Ce qui signifie finalement ?
Mme
Clémentine Autain. Que nous nous abstiendrons ! (Exclamations
sur les bancs du groupe LaREM.)
M. Bruno
Millienne. C’est plus clair !
M. le
président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme
Marie-Christine Dalloz. Lorsque l’on écrit la loi, on essaie d’employer
les mots de la façon la plus précise possible. J’ai entendu le président du
groupe Libertés et territoires, M. Philippe Vigier, nous parler de la
méfiance des jeunes générations à l’égard des régimes de retraite. Mes chers
collègues, en étant un peu lucides, objectifs et surtout honnêtes, pensez-vous
sincèrement que le fait d’écrire dans le projet de loi, comme le propose Thierry
Benoit, qu’est fixé « un objectif de confiance des jeunes générations dans
la garantie de leurs droits à retraite futurs » va leur redonner
confiance ? Soyons sérieux !
M. Hervé
Saulignac. Ce n’est pas sérieux, en effet !
Mme
Marie-Christine Dalloz. Par ailleurs, qu’entendez-vous par « jeunes
générations » ? Le sous-amendement de Marc Le Fur avait au moins
le mérite d’identifier les générations concernées, alors que l’amendement vise
toutes les générations des quarante ans à venir, ceux qui sont déjà nés, ceux
qui ne le sont pas encore…
Du point de vue sémantique, enfin, je
m’interroge sur l’expression « garantie de leurs droits à retraite
futurs ». Faut-il que les jeunes générations aient confiance dans leur
droit futur à une retraite ou dans leurs droits dans la future
retraite ?
Le Gouvernement et le rapporteur sont favorables à
l’amendement : une nouvelle fois, nous sommes en pleine communication. Dont
acte ! Mais je vous rappelle, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le
rapporteur, que depuis sept jours nous sommes victimes du fait que le
Gouvernement a choisi de faire de l’article 1er une vitrine de
sa communication sur le projet de loi. Vous y avez créé tellement de tiroirs,
contenant chacun un objet de communication, qu’il ne faut pas vous étonner du
résultat : cela fait sept jours que nous faisons de la sémantique sur vos
éléments d’affichage !
Mme
Clémentine Autain. Exactement !
M. le
président. La parole est à M. Fabien Roussel.
M. Fabien
Roussel. Nous avons terminé la séance précédente par l’adoption d’un
amendement que le groupe de la Gauche républicaine et démocrate avait défendu,
et nous voici face à un amendement sur lequel notre groupe va
s’abstenir.
Monsieur le président, je voudrais profiter de votre retour
au perchoir pour dire que les propos qui ont été tenus ces dernières heures à
notre encontre ne sont pas acceptables. (Exclamations sur les bancs du groupe
LaREM.) J’ai évoqué cet après-midi M. Jean-Michel Blanquer qui nous a
traités d’ennemis de la République. Il y a quelques heures, c’est M. Mounir
Mahjoubi qui a estimé que l’obstruction menée par nos collègues Pierre
Dharréville et Sébastien Jumel était d’un niveau de violence et de mépris sans
limites morales ; à ce niveau-là, a-t-il dit, ça mérite une intervention
médicale. (Mêmes mouvements.)
M. Roland
Lescure. Il l’a dit dans l’hémicycle ? Je n’ai pas entendu
cela !
M. Fabien
Roussel. Vous avouerez, monsieur le président, la bassesse de l’attaque.
Comment peut-on nous mépriser à ce point et remettre en cause notre envie d’un
débat démocratique ? Nous avons proposé un référendum sur ce texte de
loi ; vous n’en avez pas voulu. Nous avons déposé
10 000 amendements ; vous avez trouvé que c’était trop. Quel
chiffre vous paraît acceptable ? Nous avons voulu les défendre ; vous
en avez supprimé 1 000, que vous avez ensuite dû rétablir. Qui donc a un
problème avec le débat dans cet hémicycle ? Qui est un ennemi de la
démocratie ? (Protestations sur les bancs des groupes LaREM et
MODEM.)
Plusieurs députés du groupe
LaREM. Vous !
M. Pascal
Lavergne. Personne !
M. Fabien
Roussel. Qui a besoin d’une intervention médicale ? Cela commence à
bien faire ! Ce genre de propos est inadmissible dans le cadre d’un débat
d’une importance aussi cruciale. (Applaudissements sur les bancs du groupe
GDR.)
M. Roland
Lescure. Vous regardez trop la télévision !
M. le
président. La parole est à M. Bruno Questel.
M. Bruno
Questel. Je reviens sur l’amendement et le sous-amendement. Nous ne
pensons pas qu’il faille fixer une date, comme le groupe Les Républicains le
propose dans son sous-amendement. En revanche, le groupe La République en marche
votera l’amendement de M. Thierry Benoit.
Monsieur Roussel,
pardonnez-moi, mais quand vous vous êtes demandé dans cet hémicycle où les
marcheurs auraient été entre 1940 et 1944, il n’y a même pas eu de rappel au
règlement pour vous demander des excuses ! (Applaudissements sur
plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Mme
Brigitte Bourguignon, présidente de la commission spéciale. C’est
vrai !
M. Roland
Lescure. On n’est pas près de l’oublier !
M. le
président. Mieux vaut ne pas insister…
M. Fabien
Roussel. Quand on ne veut pas d’opposition, on l’élimine !
(Protestations sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le
président. Nous devrions nous limiter à débattre dans l’hémicycle de ce
qui en relève : le contenu du projet de loi, des amendements et des
sous-amendements. Personne n’est dupe : en partant des amendements et des
sous-amendements, chacun y va de sa digression,…
Mme
Brigitte Bourguignon, Présidente. Bien sûr !
M. le
président. …qu’il vit comme légitime. Mais nous sommes très loin de
l’exercice pour lequel nous avons été mandatés : faire la loi, évaluer les
politiques publiques et contrôler le Gouvernement. (Applaudissements sur
plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
La parole est à
M. Jimmy Pahun.
M. Jimmy
Pahun. Je voudrais remercier M. Thierry Benoit de son amendement.
J’ai trois enfants qui se posent de grosses questions sur leur avenir et se
demandent s’ils auront une retraite. Aujourd’hui, 81 % des jeunes
s’inquiètent pour leur retraite. Personnellement, je ne m’en suis pas inquiété
jusqu’à une date récente car, comme je le dis souvent, j’ai pris ma retraite
avant de me mettre au travail : j’ai eu une vie de bonheur, de plaisir et
de passion, et, en la vivant, je ne pensais pas à la retraite. Mais un
amendement comme celui-ci va rassurer les jeunes. Ma fille, 35 ans, en
mission militaire au Congo, me dit qu’elle préfère acheter une maison plutôt que
de cotiser pour la retraite ; je serai fier de pouvoir lui répondre que cet
amendement lui garantit de récupérer ce qu’elle met de côté dans quelques
années, quand viendra le moment de se reposer. (Applaudissements sur les
bancs du groupe MODEM.)
M. le
président. Monsieur Bazin, retirez-vous votre sous-amendement ? Si
c’est pour dire non, soyez bref, car nous entendons un orateur par groupe.
M. Thibault
Bazin. Monsieur le président, vous avez un strabisme divergent vers la
gauche ! Nous aurions peut-être gagné du temps si vous m’aviez donné la
parole plus tôt.
M. le
président. Non, nous entendons un orateur par groupe et votre groupe
s’est déjà exprimé.
M. Thibault
Bazin. Permettez-moi cependant de répondre à la demande collégiale de
retrait de notre sous-amendement. Nous souhaitons avancer sur le texte, mais il
s’agit d’une question de fond : ce n’est pas uniquement aux jeunes
générations qu’il faudrait donner confiance, mais à toutes les générations de
Français. En les traitant de façon différente, en ménageant d’aussi longues
transitions, vous ne suscitez pas cette confiance et ne contribuez pas à la
lisibilité de votre loi. Je retire néanmoins le sous-amendement.
(M. Philippe Vigier applaudit.)
(Le sous-amendement no 42318 est
retiré.)
(L’amendement no 10915 est
adopté.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM
et MODEM.)
M. le
président. Je suis saisi d’une série d’amendements identiques composée
de l’amendement no 3941 et des amendements no 4004 et
seize identiques déposés par les membres du groupe La France
insoumise.
Sur l’ensemble de ces amendements, je suis saisi par le groupe
La France insoumise d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est
annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à
Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement
no 3941.
Mme
Emmanuelle Ménard. J’ai l’honneur de commencer la discussion sur
l’alinéa 10 de l’article 1er.
M. Bruno
Millienne. On avance !
Mme
Emmanuelle Ménard. En l’occurrence, il s’agit malheureusement d’en
demander la suppression.
M. Bruno
Millienne. On avance quand même !
Mme
Emmanuelle Ménard. En l’état actuel du projet de loi, la lisibilité, qui
figure parmi ses objectifs, est loin d’être assurée puisque l’application de la
réforme s’échelonne dans le temps et que de trop nombreuses ordonnances viennent
rendre flous les contours du texte, ce qui le rend impossible à appréhender pour
la représentation nationale comme pour l’ensemble des Français.
On ne
sait toujours pas quel sera précisément le montant des pensions futures. Par
ailleurs, il n’est pas du tout garanti que la valeur de restitution du point ne
change pas suivant les années. Cela rend la lisibilité supposée des droits
constitués délicate à assurer. Même le Conseil d’État souligne l’absence de
lisibilité puisqu’il explique dans son avis que « le fait, pour le
législateur, de s’en remettre à des ordonnances pour la définition d’éléments
structurants du nouveau système de retraite fait perdre la visibilité d’ensemble
qui est nécessaire à l’appréciation des conséquences de la réforme […] ».
Par conséquent, je demande la suppression de l’alinéa 10, certes
intéressant sur le principe, mais totalement contredit par la suite du
texte.
M. le
président. La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir
l’amendement no 4004 et les seize amendements identiques déposés
par les membres du groupe La France insoumise.
M. Loïc
Prud’homme. Nous demandons la suppression de l’alinéa 10. Les
arguments du Conseil d’État, que je ne reprendrai pas, montrent de façon limpide
l’absence de lisibilité du projet de loi.
De quelle lisibilité peut-on
parler quand le système par points est fondé sur le fameux revenu moyen
d’activité par tête, dont on ne sait rien – un indicateur qui n’existe pas
et dont l’INSEE dit ne pas avoir reçu la commande –, d’autant que, pour
certains syndicats, cet indicateur permettra de faire baisser le niveau des
pensions ?
De quelle lisibilité peut-on parler quand rien n’est
précisé quant aux retraites des agriculteurs, qui relèvent aujourd’hui du régime
de la Mutualité sociale agricole, la MSA – 670 000 cotisants pour
2,5 millions de retraités ? Les choses sont encore plus floues pour
les conjointes de chefs d’exploitation, dont la pension s’élève aujourd’hui en
moyenne à 580 euros.
L’alinéa 10 se présente donc comme une
pure incantation. Personne n’y croit et vous êtes bien en peine de répondre à
ces éléments pour trouver une quelconque lisibilité à votre projet – un
flou artistique du début jusqu’à la fin.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements
identiques ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Absolument défavorable. Je l’ai dit
hier : je mets au défi quiconque de calculer, à dix ans de la retraite, la
pension à venir d’un citoyen lambda – fonctionnaire, salarié du privé ou
mélange des deux – en tenant compte, pour les femmes, des droits liés aux
naissances. C’est d’une extrême complexité ! En plus, il faut retrouver les
coefficients de réévaluation des vingt-cinq meilleures années, qui suivent
l’inflation… Je vous assure que ce n’est pas évident.
Pour apprécier la
lisibilité du projet de loi, je vous invite à examiner l’article 12 où, à
la suite de l’examen du texte en commission spéciale, nous inscrirons dans le
dur la création d’un compte personnel de carrière. Accessible à tout moment, cet
espace fera apparaître le nombre de points déjà acquis et le nombre de points
multiplié par la valeur du point – même si celle-ci peut évidemment être
revalorisée chaque année, dans des proportions tout à fait transparentes,
surtout lorsque l’on s’approche de la retraite. Le montant de la pension à venir
sera donc très facile à calculer.
Monsieur Prud’homme, vous trouvez
difficile à comprendre ce qu’il adviendra de la retraite des agriculteurs. Mais
essayez donc de comprendre comment les retraites agricoles sont calculées
aujourd’hui ! Il s’agit de systèmes non proportionnels, avec des phases et
des plateaux. C’est très complexe ; la seule chose dont on est sûr, c’est
d’avoir une faible retraite. C’est pourquoi nous instaurons une retraite
minimale à 1 000 euros à partir du 1er janvier 2022.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. –
M. Bruno Millienne applaudit également.)
M. le
président. La parole est à Mme Coralie Dubost.
Mme Coralie
Dubost. Madame Ménard, votre argumentation m’étonne : faut-il, pour
que la réforme soit lisible, prendre une décision brutale, quitte à créer des
effets de bord pour nos concitoyens ? La complexité vient de la prise en
compte des singularités ; c’est donc une excellente nouvelle. Cela veut
dire que le système universel est capable de traiter toutes les situations
particulières. Quand bien même cela pourrait vous paraître complexe, je pense
qu’il est bon d’éviter une communication trop brutale, du type de celle dont on
peut être témoin dans les territoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs
des groupes LaREM et MODEM.)
M. Roland
Lescure. Eh oui !
M. le
président. La parole est à Mme Clémentine Autain.
Mme
Clémentine Autain. Chers collègues, vous préparez ce projet de loi
depuis deux ans au moins et il est stupéfiant de vous voir arriver, au bout de
ce délai, avec un texte qui n’est pas au point sur une série de catégories
professionnelles qui mériteraient un traitement spécifique du fait de leur
pénibilité. De plus, le texte prévoit vingt-neuf ordonnances – et sans
doute plus encore puisque des amendements gouvernementaux se préparent à en
introduire de nouvelles.
Le texte est particulièrement illisible, d’abord
parce qu’il a des trous et ensuite parce que, comme l’a souligné le Conseil
d’État – nous ne sommes donc pas les seuls à le dire –, on ne comprend
rien à la façon dont sera calculé le point. Par ailleurs, l’évolution de l’âge
d’équilibre créera autant de régimes que de générations. Cela fait beaucoup de
raisons de trouver le projet de loi illisible.
Vous nous demandez de
signer un chèque en blanc puisque le Gouvernement pourra décider par la suite
comment les règles seront définies pour toute une série de professions. Quant au
point, sa valeur va bouger en fonction de la règle d’or imposée par Bruxelles,
mais soutenue par votre gouvernement. Voilà ce qui se joue aujourd’hui ;
c’est donc en toute logique que nous ne voulons pas conserver la mention d’un
objectif de lisibilité dans le texte d’une loi totalement illisible.
M. le
président. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Mme
Emmanuelle Ménard. Je voulais saluer et remercier Mme Dubost, qui
vient d’arriver dans l’hémicycle après sept jours de discussion !
Mme
Brigitte Bourguignon, Présidente. Oh ça va, d’autres sont arrivés
en cours de route, et on ne leur fait pas la remarque !
Mme Coralie
Dubost. J’étais là vendredi !
Mme
Emmanuelle Ménard. Madame Dubost, cela sent un tout petit peu le
règlement de comptes personnel, mais je ne voudrais surtout pas attribuer votre
intervention à votre récente visite à Béziers, qui ne s’est pas déroulée
exactement comme vous le souhaitiez. (Exclamations sur les bancs des groupes
LaREM et MODEM.)
M. le
président. Restons sur les retraites, je vous prie ! Ah, l’Hérault,
« c’est beau, mais c’est loin », comme disait le président Chirac…
(Sourires et exclamations sur plusieurs bancs.)
Mme
Emmanuelle Ménard. Dans mon cœur, l’Hérault est toujours présent, et je
suis toujours là pour le représenter.
M. le
président. Allez, n’en profitez pas, avancez !
Mme
Emmanuelle Ménard. Madame Dubost, je vous remercie pour votre
condescendance, que les Français apprécient toujours dans ce genre de
cas.
Quant au manque de lisibilité de ce texte, madame Dubost et chers
collègues de la majorité, si vous interrogiez les Français dans la rue, ce
serait la première chose dont ils vous parleraient. Personne n’y comprend rien
et je ne suis pas sûre que vous y compreniez grand-chose vous-mêmes. (Mêmes
mouvements.)
M. Roland
Lescure. Et ça, ce n’est pas de la condescendance ?
M. le
président. La parole est à M. Bruno Fuchs.
M. Bruno
Fuchs. Le refus de contribuer à la construction de ce texte revient à
garantir le maintien des quarante-deux régimes actuels (Applaudissements sur
quelques bancs du groupe LaREM) qui sont illisibles et injustes, comme nous
le démontrons à chaque intervention. J’ai fait un aller-retour à Mulhouse, dans
ma circonscription, qui est très proche de Paris…
M. Raphaël
Schellenberger. Très bref !
M. Bruno
Fuchs. C’est à deux heures d’ici ! J’ai rencontré Stéphanie, une
danseuse de l’Opéra national du Rhin, une institution qui n’a pas de régime
spécial. Cette jeune femme a dû s’arrêter de danser à l’âge de 37 ans, et,
depuis, elle est passée d’un petit travail à l’autre, sans avoir aucune
visibilité concernant sa future retraite. Elle vit avec 500 euros de
revenus mensuels.
Pour elle et pour tous les autres, il faut un système
plus lisible. Si vous ne trouvez pas cette réforme assez claire, chers
collègues, contribuez à la rendre plus lisible par le biais d’amendements
constructifs. Rendez-vous à l’article 12 !
M. le
président. La parole est à M. Gérard Cherpion.
M. Gérard
Cherpion. Comme tous les précédents, cet alinéa 10 fixe un
objectif, en l’occurrence « un objectif de lisibilité des droits constitués
par les assurés tout au long de leur vie active ». Comment ne pas être
d’accord dès lors que nous manquons de visibilité sur l’ensemble du texte ?
Cependant, nous avons eu tout à l’heure un éclairage tout à fait particulier,
puisque le secrétaire d’État nous a expliqué à la fin de la séance de
l’après-midi qu’il y aurait une augmentation des cotisations et de l’âge de
départ à la retraite. Voilà au moins deux éléments de lisibilité !
(Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le
président. Je mets aux voix les amendements no 3941 et
identiques.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le
président. Voici le résultat du
scrutin :
Nombre de
votants 108
Nombre
de suffrages
exprimés 93
Majorité
absolue 47
Pour
l’adoption 7
Contre 86
(Les amendements no 3941 et
identiques ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Je suis saisi d’un amendement no 2551 qui
fait l’objet de plusieurs sous-amendements.
La parole est à M. Hervé
Saulignac, pour soutenir l’amendement.
M. Hervé
Saulignac. Il nous semble utile d’améliorer la lisibilité et, surtout,
la sincérité du projet de loi. C’est d’ailleurs le Gouvernement lui-même qui,
dans cet alinéa, fixe « un objectif de lisibilité des droits constitués par
les assurés tout au long de leur vie active ». Or, à cet égard, si j’en
juge par l’avis du Conseil d’État, le texte est perfectible.
Le système
universel proposé sera peut-être plus simple pour ceux qui auront effectué
l’intégralité de leur carrière dans ce système, mais pas pour les gens nés entre
1975 et 2003, dont la carrière pourra relever de plusieurs systèmes, voire de
plusieurs régimes dans plusieurs systèmes. Ces assurés rencontreront de très
grandes difficultés pour clarifier leurs droits et vérifier qu’ils ont bien été
intégralement pris en compte.
Le présent amendement précise donc que
l’objectif de lisibilité des droits ne s’applique qu’aux assurés nés à compter
de 2004.
M. le
président. Le sous-amendement no 42431 de M. Ugo
Bernalicis est défendu.
Nous en venons au sous-amendement
no 42112. Monsieur Roussel ?
M. Fabien
Roussel. Il est défendu, de même que tous nos sous-amendements qui le
suivent.
M. le
président. Les sous-amendements nos 42112, 42111, 42113,
42110, 42114, 42115 et 42116 sont donc défendus.
La parole est à
Mme Clémentine Autain, pour soutenir le sous-amendement
no 42427.
Mme
Clémentine Autain. Nous soutenons l’amendement déposé par le groupe
Socialistes pour la bonne et simple raison qu’une attention toute particulière
doit être accordée aux générations qui vont se situer dans l’entre-deux. Pour
l’instant, cette période transitoire est, elle aussi, particulièrement floue, ne
serait-ce que parce que la conférence de financement n’est pas allée à son
terme. Malgré cela, nous sommes là, en train d’étudier ce projet de
loi.
À cette occasion, je voudrais répondre à notre collègue Fuchs qui a
évoqué la situation d’une danseuse qui, après une carrière professionnelle, va
d’un petit boulot à l’autre, en ayant du mal à anticiper la suite des
événements. Dans un système par points, sa situation ne sera pas plus claire et
elle ne pourra pas davantage anticiper, si elle ne connaît pas l’évolution de sa
carrière.
M. le
président. L’amendement ne porte pas sur la danseuse mais sur des choses
précises, madame Autain. Il faut se concentrer sur le thème des amendements, si
vous le voulez bien.
Mme
Clémentine Autain. Je vous remercie beaucoup, monsieur le président,
pour vos leçons…
M. le
président. Ce n’est pas une leçon, madame.
Mme
Clémentine Autain. Si, c’est une leçon…
M. le
président. C’est le règlement, ce n’est pas la même chose !
Mme
Clémentine Autain. Non, absolument pas, monsieur le président. Quand
nous prenons la parole, nous avons deux minutes…
M. le
président. Ce ne sont pas deux minutes pour vaticiner ou pour digresser.
Elles servent à s’exprimer sur l’amendement ou sur le sous-amendement.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Mme
Clémentine Autain. Alors, chaque fois qu’un député va digresser…
M. le
président. C’est à quoi cela sert. C’est pour cela qu’il y a une
assemblée, un règlement. (Mêmes mouvements.) Et cela vaut pour tout le
monde !
Mme
Clémentine Autain. Monsieur le président, vous savez qu’il y a deux
poids, deux mesures dans les leçons que vous donnez aux uns et aux autres.
M. le
président. Non, il n’y a pas deux poids, deux mesures. Il y a trop de
poids et de mesures !
Mme
Clémentine Autain. Je ne manquerai pas de vous le faire remarquer tout à
l’heure !
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et sur les
sous-amendements ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. À l’alinéa 10, l’amendement propose
d’ajouter « nés à compter du 1er janvier 2004 » après
le mot « assurés ». Les sous-amendements issus des groupes de La
France insoumise et de la Gauche démocrate et républicaine visent à le
reformuler en écrivant « dès le 1er janvier 2004 » ou
« après le 1er janvier 2004 » ou « après la date
du 1er janvier 2004 », ou même « dont la date de
naissance précède le 1er janvier 2004 » ! Vu le niveau
des sous-amendements, j’émets un avis défavorable.
M. Fabien
Roussel. Les sous-amendements n’ont même pas été présentés ! Il
faut suivre, monsieur le rapporteur !
M. Hervé
Saulignac. Et l’amendement, alors ?
M. le
président. La parole est à M. Hervé Saulignac.
M. Hervé
Saulignac. Monsieur le rapporteur vient de répondre sur des
sous-amendements qui n’ont pas été présentés, et il n’a même pas répondu sur
l’amendement. Je n’ai rien à faire d’un avis sur des sous-amendements qui n’ont
pas été présentés. En revanche, j’en veux un sur l’amendement que nous avons
proposé !(Applaudissements sur les bancs des groupes FI et
GDR.)
(Les sous-amendements nos 42431, 42112,
42111, 42113, 42110, 42114, 42115, 42116 et 42427, successivement mis aux voix,
ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 2551 n’est pas
adopté.)
M. le
président. Je suis saisi de deux amendements identiques,
nos 11373 et 22700.
L’amendement no 11373
de M. Fabrice Brun est défendu.
La parole est à M. Dino
Cinieri, pour soutenir l’amendement no 22700.
M. Dino
Cinieri. L’alinéa 10 assigne un objectif de lisibilité des droits
constitués par l’assuré tout au long de sa vie active. Il arrive pourtant qu’au
cours d’une vie se succèdent des périodes actives, de travail ou de chômage, et
des périodes d’inactivité. L’assuré doit être en mesure de prévoir la valeur de
ses droits à la retraite, y compris en période d’inactivité.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Une précision sémantique : en fait,
les cas visés sont bien couverts par la notion de « vie active », car,
par opposition à l’inactivité, la vie active englobe aussi bien les périodes
d’emploi que les périodes d’interruption ou de chômage. Votre amendement étant
donc satisfait, je demande son retrait. À défaut, j’émettrai un avis
défavorable.
(Les amendements identiques nos 11373 et
22700, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)
M. le
président. La parole est à M. Pierre Vatin, pour soutenir
l’amendement no 42532.
M. Pierre
Vatin. Par souci de cohérence, le présent amendement tend à imposer la
cotisation à tous les revenus, y compris ceux qui excèdent trois plafonds
annuels de la sécurité sociale – PASS.
(L’amendement no 42532, repoussé par le
Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le
président. La parole est à M. Hervé Saulignac, pour soutenir
l’amendement no 23853.
M. Hervé
Saulignac. Toujours par souci – partagé, je n’en doute pas –
de garantir la lisibilité des droits aux assurés, nous proposons de compléter
l’alinéa 10 par les mots : « et ce dès la publication de la
présente loi ». En effet, il est impératif que chaque assuré puisse
déterminer ses droits dès l’adoption de ce texte et non pas à une date
indéterminée qui pourrait donc être très tardive. Si tel n’était pas le cas,
cette réforme porterait atteinte aux principes de clarté et d’intelligibilité de
la loi.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Les différents outils d’accès aux droits de
consultation et d’information seront mis à disposition à compter de 2022. En
faire une obligation dès la promulgation de la loi ne serait ni réaliste ni
sincère. Ne prenons pas des engagements que nous ne pourrions pas tenir. Avis
défavorable.
M. le
président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier
Véran, ministre. Je vous invite à retirer cet amendement qui, à
mon sens, est satisfait. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
(L’amendement no 23853 n’est pas
adopté.)
M. le
président. Sur les amendements identiques nos 24533,
27401 et 32963, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de
scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée
nationale.
La parole est à M. Stéphane Viry, pour soutenir
l’amendement no 24533.
M. Stéphane
Viry. Votre réforme suscite beaucoup d’interrogations et, parmi les
sujets que vous mettez sur la table, il en est un sur lequel nous n’avons pu
obtenir aucune garantie, en dépit de vos allégations : la maîtrise de la
valeur des pensions et de celle du point.
L’article 1er
fixe des objectifs et pose des principes. Pour répondre à l’anxiété qu’inspire
aux Français le fait que, dans le futur système, le montant des pensions sera
défini par la valeur du point, nous proposons d’y établir le principe de la
stabilité des pensions et de l’indexation du point.
Sans bouleverser
votre projet de loi, ce principe permettrait d’anticiper les changements de
majorité. La démocratie étant faite d’alternances, tôt ou tard, d’autres que
vous seront au pouvoir. Sans faire de procès d’intention à quiconque, il
faudrait faire en sorte qu’un gouvernement ne puisse pas avoir l’idée de
modifier la valeur du point à l’insu du peuple.
Le fait de l’inscrire
très clairement à l’alinéa 10 de l’article 1er permettrait
d’apporter aux Français l’élément de stabilité et de certitude qu’ils attendent.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le
président. La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir
l’amendement no 27401.
M. Dino
Cinieri. Il tend à assurer la stabilité du niveau des pensions et de
l’indexation du point. En effet, le point est une variable d’ajustement
facilement utilisable. Cette faiblesse pourrait être utilisée à l’avenir par un
gouvernement afin de faire baisser les pensions sans que les cotisants ne s’en
rendent compte.
M. le
président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir
l’amendement no 32963.
M.
Jean-Pierre Door. Dans la lignée des propos de mes collègues et de nos
débats de cet après-midi, je préconise l’instauration d’une règle d’or sur la
valeur du point et la stabilité du niveau des pensions. En Suède, par exemple,
le gouvernement a modifié la valeur du point en raison de contraintes sociales,
financières et budgétaires. C’est pourquoi il est impératif de fixer et de
stabiliser le niveau des pensions et la valeur du point.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements
identiques ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Je comprends, monsieur Door, votre
prédilection pour la règle d’or, mais, en l’occurrence, il y a une vraie
divergence entre nous. Vous souhaitez que l’indexation du point soit
stable ; nous proposons qu’elle soit dynamique. Nous souhaitons en effet
mettre fin à trente années d’indexation sur l’inflation qui ont conduit à un
écart de valorisation de 30 % sur les vingt-cinq dernières années. J’admets
que cela a permis de préserver l’équilibre du système, mais nous préférons
désormais une indexation dynamique, sur l’évolution des revenus.
M. le
président. La parole est à M. Damien Abad.
M. Damien
Abad. Ce que vous proposez, monsieur le rapporteur, se vérifiera, mais
seulement après 2044. Vous le savez bien : l’indexation du point sur
l’évolution des salaires n’aura lieu qu’après cette date, et encore, si tout va
bien. Il y aura donc une période de transition intenable.
Là encore, vous
avez fait une fausse promesse aux Français : tout le monde croit que la
valeur du point sera indexée sur les salaires ; la vérité, c’est que ce ne
sera pas le cas avant 2044.
Nous attendons donc des réponses précises.
Évitons la confusion au moment où nous examinons l’objectif de
lisibilité !
M. le
président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Dès 2022, on commencera à se rapprocher de
l’indexation sur les revenus.
M. Damien
Abad. Mais c’est en 2044 qu’on y arrive !
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Non : en 2044, la valeur du point
devra être indexée sur les revenus, mais dès 2022, elle devra être comprise
entre le niveau de l’inflation – donc être supérieure à l’inflation –
et celui du revenu moyen par tête.
M. le
président. Ne nous lançons pas dans un débat de commission ! Nous
avons compris les différents points de vue.
Je mets aux voix les
amendements identiques nos 24533, 27401 et 32963.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le
président. Voici le résultat du
scrutin :
Nombre de
votants 101
Nombre
de suffrages
exprimés 98
Majorité
absolue 50
Pour
l’adoption 25
Contre 73
(Les amendements identiques nos 24533,
27401, 32963 ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Je suis saisi de l’amendement no 26727 et de
quinze amendements identiques déposés par les membres du groupe de la Gauche
démocrate et républicaine.
Ces amendements font l’objet de deux
sous-amendements.
Sur les amendements identiques, je suis saisi par les
groupes La France insoumise et la Gauche démocrate et républicaine d’une demande
de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée
nationale.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir ces
amendements.
M. Stéphane
Peu. Comme la plupart de nos amendements, ils formulent une proposition
concrète : inscrire, à l’alinéa 10 de l’article 1er,
l’objectif de parité du niveau de vie entre les retraités et les
actifs.
Notre système de retraite est envié dans le monde entier. Il doit
certes être réformé, adapté aux réalités actuelles du marché du travail et
modernisé, mais nous devons conserver ses fondamentaux, que votre réforme met à
bas.
Pourquoi notre système nous est-il envié ? Tout d’abord,
parce qu’il est solidaire et qu’il garantit un taux de remplacement prévisible.
Ensuite, parce qu’il s’appuie sur de puissants mécanismes de redistribution
grâce à 60 milliards d’euros de prestations de solidarité. Notre système
permet ainsi de réduire la pauvreté des retraités : en France, le taux de
pauvreté des retraités est de 7 % – ce dont on ne peut évidemment pas
se satisfaire –, contre 14 % en moyenne dans les pays européens. Le
système français garantit donc un niveau de pauvreté deux fois
inférieur.
Lors de son audition devant la commission spéciale, le
président du COR – Conseil d’orientation des retraites – nous a fait
part de son inquiétude : le niveau de vie moyen des retraités par rapport
aux actifs, qui s’élève aujourd’hui à 105 %, devrait diminuer rapidement
pour passer à 85 %.
M. Régis
Juanico. Et même à 75 % !
M. Stéphane
Peu. Cette évolution ne sera pas le fruit de votre seule réforme, car
elle s’explique aussi par des réformes passées. Mais celle dont nous débattons
aggravera la situation puisque le taux de remplacement et le niveau des pensions
vont baisser.
À défaut de vous convaincre de ne pas toucher au système de
retraite construit par notre pays au fil des décennies, nous vous demandons de
préserver au moins le niveau de revenu de nos retraités en inscrivant cet
objectif dans l’alinéa 10. (Mme Elsa Faucillon et
M. Olivier Faure applaudissent.)
M. le
président. Les sous-amendements nos 42433 de
Mme Clémentine Autain et 42435 de M. Éric Coquerel sont
défendus.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements et
sous-amendements ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Bien que nous ayons déjà discuté de ce
sujet à plusieurs reprises, je veux, monsieur Peu, vous apporter quelques
éléments de réponse.
Loin de moi l’idée de critiquer les précédentes
réformes du système de retraite. Elles ont toujours été compliquées,…
M.
Dominique Potier. Pas tant que ça !
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. …mais elles ont permis de préserver notre
système. Avec ces réformes, le taux de pauvreté des retraités est passé de
10 % en 1993 – il y a eu une réforme des retraites cette
année-là – à 7 % aujourd’hui. C’est bien la preuve que l’on peut à la
fois réformer le système, apporter des garanties financières aux générations
futures et abaisser le taux de pauvreté. (Exclamations sur les bancs des
groupes FI et GDR.)
Je partage évidemment l’intention qui préside à
votre amendement, mais soyons prudents s’agissant des équilibres. La génération
qui souffre du plus fort taux de pauvreté aujourd’hui – 30 % –
est celle des 25-30 ans.
Je suis donc défavorable à l’inscription à
l’alinéa 10 de l’objectif de parité du niveau de vie entre les retraités et
les actifs : dans les conditions actuelles, il conduirait à réduire le
niveau de vie des retraités par rapport aux actifs puisque le premier représente
actuellement 106 % du revenu moyen, contre 97 % pour les
actifs.
M. le
président. La parole est à Mme Clémentine Autain.
Mme
Clémentine Autain. Votre argumentaire est éclairant, monsieur le
rapporteur. Ce que vous dites, en réalité, c’est que l’objectif de parité du
niveau de vie entre les retraités et les actifs, dans un contexte de
paupérisation de la société française, risque d’appauvrir les retraités.
M. Frédéric
Petit. Mais non ! Aujourd’hui, les retraités ont plus que les
actifs !
Mme
Clémentine Autain. Nous serions alors dans une courbe descendante d’un
point de vue social et économique. Je saisis bien la logique qui est la vôtre et
qui vous empêche d’approuver l’amendement du groupe communiste…
Vous avez
dit qu’il y avait moins de retraités pauvres qu’auparavant, mais, du point de
vue de la parité de revenu entre retraités et actifs, le passage des dix aux
vingt-cinq meilleures années pour calculer le montant de la pension a appauvri à
coup sûr l’ensemble des retraités.
Aujourd’hui, vous nous proposez de
fonder ce calcul non plus sur les vingt-cinq meilleures années, mais sur
l’ensemble de la carrière : ce sera une nouvelle régression. Et je ne parle
pas des enjeux liés au calcul des points et à l’âge d’équilibre, qui retarderont
l’âge de départ à la retraite et paupériseront les retraités victimes de la
décote.
Je comprends votre avis défavorable, mais les raisons en sont
tristes : votre vision est celle d’une situation sociale en constante
détérioration, du fait du système de retraite que vous proposez et de la
conjoncture économique que vous anticipez.
M. le
président. La parole est à M. Frédéric Petit.
M. Frédéric
Petit. Je ne fais pas la même analyse que vous des propos du rapporteur,
madame Autain. Actuellement, le niveau de vie des retraités est supérieur à
celui des actifs. L’objectif de l’amendement n’a donc pas de sens : s’il
était atteint, la situation des retraités serait moins favorable
qu’aujourd’hui…
Mme
Clémentine Autain. Mais c’est de parité qu’il s’agit !
M. Frédéric
Petit. J’ajoute que ce ne sont pas les objectifs généraux de
l’article 1er qui font la valeur sonnante et trébuchante des
pensions ; ce sont les mesures prises dans les articles suivants.
Je pense donc, comme le rapporteur, que l’amendement n’est pas
pertinent : l’objectif est déjà dépassé. L’avis défavorable qu’il a émis à
son sujet ne préjuge en rien des mesures que nous allons prendre pour consolider
les pensions des retraités.
M. le
président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme
Marie-Christine Dalloz. Je suis inquiète sur plusieurs points. L’étude
d’impact indique qu’à titre transitoire, des modalités sont prévues pour lisser
le passage d’une indexation sur l’inflation à une indexation sur les revenus. Le
croisement entre les deux est difficile à comprendre. Chacun sait ce qu’est une
indexation, mais deux paramètres sont ici considérés, sans parler de celui que
vous inventez, le revenu moyen par tête, qui n’est pas un indicateur
connu.
Nous demandons qu’un lien clair soit créé entre l’indexation de la
valeur d’acquisition du point et l’indexation de sa valeur de service. Ce serait
logique, cohérent,…
M. Damien
Abad. Exactement !
Mme
Marie-Christine Dalloz. …et cela permettrait de savoir à quel niveau les
futurs retraités vont se situer. Car les risques du projet sont multiples :
qu’il s’agisse de la super-décote, dont nous avons amplement parlé au début de
l’examen du projet de loi, de la décote, appliquée aux personnes qui partent à
la retraite à 62 ou 63 ans, ou du flou artistique sur le mode de calcul des
indexations, les Français ont des raisons de s’inquiéter.
(Les sous-amendements nos 42433 et 42435,
successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Je mets aux voix les amendements no 26727 et
identiques.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le
président. Voici le résultat du
scrutin :
Nombre de
votants 101
Nombre
de suffrages
exprimés 97
Majorité
absolue 49
Pour
l’adoption 14
Contre 83
(Les amendements no 26727
et identiques ne sont pas adoptés.)
Suspension et reprise de la séance
M. le
président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures trente, est reprise à vingt-deux
heures quarante.)
M. le
président. La séance est reprise.
Rappel au règlement
M. le
président. La parole est à M. Olivier Faure, pour un rappel au
règlement.
M. Olivier
Faure. Sur le fondement de l’article 139, alinéa 1, relatif au
dépôt d’une proposition de résolution tendant à la création d’une commission
d’enquête parlementaire, monsieur le président.
La présidente de notre
groupe vous a saisi en conférence des présidents, dans le cadre de notre droit
de tirage, d’une demande de création d’une commission d’enquête. Celle-ci a un
lien direct avec nos débats puisqu’il ne s’agira de rien de moins que d’enquêter
sur l’étude d’impact portant sur les projets de loi relatifs au système
universel de retraite, jugée largement lacunaire par le Conseil d’État, et que
les parlementaires que nous sommes considérons aussi comme assez largement
truquée. Nous avons demandé à plusieurs reprises où en était le courrier de
notification que vous deviez adresser à Mme Belloubet, ministre de la
justice, qui a elle-même dit hier soir ne pas l’avoir reçu.
M. Raphaël
Schellenberger. Ce serait bien de le lui envoyer avant qu’elle ne soit
éjectée du Gouvernement !
M. Olivier
Faure. Je sais bien qu’en douze jours, le temps vous était compté… Mais
je crois avoir compris que vous étiez contre toute forme d’obstruction, et rien
ne serait pire qu’une obstruction présidentielle qui conduirait à ce que cette
commission d’enquête ne voie pas le jour dans les délais requis pour qu’elle
puisse éclairer nos débats.
C’est la raison pour laquelle, monsieur le
président, j’aimerais savoir si ce courrier est parti. Si tel n’était pas le
cas, je suis prêt à le prendre ce soir et à traverser moi-même la Seine pour le
remettre, place Vendôme, à la ministre de la justice. (Exclamations sur les
bancs du groupe LR.)
Monsieur le président, j’attends votre réponse
puisque c’est de vous qu’il s’agit. (M. Régis Juanico
applaudit.)
M. le
président. Monsieur Faure, je n’ai pas besoin que vous proposiez d’être
vaguemestre :…
M. Olivier
Faure. Estafette !
M. le
président. …je peux vous dire qu’à la présidente de votre groupe,
Mme Valérie Rabault, est parvenue la copie du courrier envoyé en temps et
en heure.
M. Olivier
Faure. Ce n’est pas ce qu’elle m’a dit ! La ministre ne l’a pas
reçu !
M. le
président. Téléphonez à Mme Rabault : elle l’a ; nous en
avons débattu voici moins de deux jours. Quant à la garde des sceaux, elle a été
saisie, elle répondra.
M. Olivier
Faure. J’espère !
M. le
président. Avant de vous inquiéter du non-accomplissement d’une
procédure, assurez-vous que vous ne disposez pas des éléments qui auraient pu
nous dispenser de ce rappel au règlement. (Applaudissements sur plusieurs
bancs du groupe LaREM.)
Article 1er (suite)
M. le
président. Je suis saisi de l’amendement no 26729 et de
quinze amendements identiques déposés par les membres du groupe de la Gauche
démocrate et républicaine. Ils font l’objet de deux sous-amendements,
nos 42441 et 42442.
La parole est à Mme Elsa
Faucillon, pour soutenir ces amendements.
Mme Elsa
Faucillon. Ils proposent d’inscrire dans le texte, après
l’alinéa 10, un « objectif de réduction du travail
prescrit ».
On est ici au cœur de ce qui oppose deux projets de
société. En effet, par votre réforme, vous préconisez – et vous faites tout
pour – que les citoyens de notre pays travaillent plus pour percevoir
moins, les poussant à éviter à tout prix le moindre accident de la vie et à
travailler plus longtemps pour s’épargner une décote. Notre objectif est tout
autre ; la réduction du travail prescrit vaudrait non seulement sur la
semaine ou sur l’année, ce qui serait déjà important, mais tout au long de la
vie. Les citoyens, les travailleurs ont besoin de pouvoir partir à la retraite
en bonne santé. Nous n’avons cessé d’affirmer que l’équilibre n’était pas un
objectif en soi mais un moyen, et qu’il était possible de partir à 60 ans
par la mise en œuvre de nos propositions de financement.
C’est d’autant
plus nécessaire que la courbe du chômage des seniors ne cesse de progresser. Les
seniors relèvent même de ce que l’on appelle le halo du chômage : ils
disparaissent des radars, ne sont plus indemnisés et savent qu’ils devront
traîner jusqu’à la retraite pour pouvoir liquider leur retraite.
Dans le
même temps, les jeunes, eux, doivent attendre de plus en plus longtemps pour
trouver un emploi pérenne – quand ils y arrivent. Élue d’une
circonscription populaire, je peux vous assurer que les jeunes y attendent de
trouver du travail – loin d’ailleurs de se contenter d’attendre, ils
partent à la recherche d’un travail et aimeraient pouvoir en trouver, tout comme
ils souhaiteraient voir leurs aînés partir en bonne santé. (Applaudissements
sur les bancs du groupe GDR. – M. Dominique Potier applaudit
également.)
M. le
président. La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir les
sous-amendements nos 42441 et 42442, qui peuvent faire l’objet
d’une présentation groupée.
M. Loïc
Prud’homme. Je ne reprendrai pas tous les arguments développés par ma
collègue Elsa Faucillon, mais les compléterai en soulignant que la notion
centrale de réduction du temps de travail va à l’encontre du discours que vous
tenez depuis des mois. Vous expliquez en effet qu’il faut travailler plus
longtemps pour équilibrer un système de retraite que vous présentez à tort comme
déséquilibré, arguant de l’existence d’un déficit démographique : pour
compenser la baisse du nombre de cotisants, ceux qui restent devraient
travailler plus longtemps pour payer les retraites – j’en parlais tout à
l’heure.
En réalité, vos arguments ne tiennent pas, même en prenant en
considération le temps long : depuis maintenant plusieurs décennies, nous
travaillons moins – le travail prescrit a considérablement diminué –,
alors même que la productivité a été multipliée par trois. Cela signifie bien
qu’on peut continuer à réduire le temps de travail, notamment le temps de
travail prescrit, tout en permettant à chacun de partir avec une pension digne
et en assurant l’équilibre du système – car c’est là aussi essentiel. Telle
est en tout cas notre conception d’un système de retraite juste, dont nous avons
fait la preuve qu’il serait équilibré s’il était instauré.
La notion de
travail prescrit va à contre-courant des fake news que vous colportez depuis des
mois, selon lesquelles, pour équilibrer le système, il faudrait sans cesse
allonger le temps de travail, jusqu’à la mort, jusqu’à demander aux Français de
partir à la retraite les pieds devant pour vous faire plaisir.
Mme Nadia
Hai. On ne souhaite la mort de personne !
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur cette série
d’amendements identiques et sur les sous-amendements ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Ils visent à assigner au système universel
de retraite « un objectif de réduction du travail prescrit ». Or il ne
faut pas confondre les objectifs du système de retraite et ceux du marché du
travail.
Je souhaite souligner à quel point, en la matière, nos
philosophies et nos approches diffèrent. Il apparaît clairement, dans vos
argumentations, que vous assimilez le travail à une contrainte et à un
asservissement.
M. Loïc
Prud’homme. C’est le cas !
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Je ne nie pas que certains emplois soient
pénibles ou présentent un intérêt limité, mais je crois aussi que le travail
peut être un lieu d’épanouissement et d’intégration dans la société.
Pour
notre part, nous préférons nous appuyer sur la formation tout au long de la vie
pour que ceux qui exercent un métier pénible ou peu intéressant puissent
progresser dans leur carrière – c’est un premier objectif. S’agissant des
enjeux plus étroitement liés à la réforme des retraites, nous entendons mener de
vraies réflexions sur la gestion de la fin de carrière. Comment faire en sorte
que l’âge ne soit pas une contrainte mais un atout, en encourageant, par
exemple, la transmission de l’expérience ? Comment favoriser les
transitions douces, le cumul emploi-retraite ou le départ progressif ?
Voilà quelques-uns des enjeux liés au système universel de retraite, que nous
pourrons présenter de façon plus détaillée ultérieurement.
Je demande
donc le retrait des amendements et des sous-amendements. À défaut, l’avis sera
défavorable.
M. le
président. La parole est à M. Éric Woerth.
M. Éric
Woerth. Nous avons déjà eu ce débat – nous les avons à peu près
tous eus cette semaine… (Sourires.) La productivité du travail n’augmente
plus, ni en France ni ailleurs – les économistes se demandent d’ailleurs
pourquoi.
« Travailler jusqu’à la mort », voilà une formule
terrible, qui, heureusement, ne correspond pas à la réalité.
M. Loïc
Prud’homme. Ça arrive !
M. Éric
Woerth. Les Français vivent en moyenne vingt-cinq ans à la retraite
– en plus ou moins bonne santé selon les cas, mais généralement avec une
santé à peu près correcte. Certes, quand on vieillit, on a mal partout, c’est
globalement vrai. Vous savez très bien, pour autant, que cette histoire
d’espérance de vie en bonne santé n’a aucun sens, car elle repose sur un
indicateur très relatif et purement déclaratif.
On tient fort
heureusement compte de ces aspects dans le système de retraite actuel, à travers
les carrières longues ou la prise en compte de la pénibilité, même s’il faut
encore améliorer les choses. N’affirmez pas que les personnes meurent sitôt leur
retraite prise ; c’était vrai il y a cent ans, mais ce n’est plus le cas,
Dieu merci ! Nous ne pouvons pas débattre si vous n’avez pas la vérité dans
la bouche.
Enfin, il n’existe aucun lien entre le taux de chômage et le
temps de travail.
Mme
Clémentine Autain. Mais si !
M. Éric
Woerth. Ce n’est pas vrai. Nous avons déjà eu ce débat il y a très
longtemps, au moment de la réforme des 35 heures. Et le niveau du chômage
n’est pas non plus lié à l’âge légal de départ à la retraite : on peut
repousser cet âge tout en augmentant le taux d’activité des seniors. La question
de l’emploi des seniors renvoie à un problème de culture et d’adaptation de
notre société au travail de cette catégorie d’actifs. C’est sur ces aspects
qu’il nous faut travailler : tout ne peut pas se régler par une réforme des
retraites. Si vous prétendez régler les questions sociales, les questions de
droit du travail ou encore les questions économiques à travers le système de
retraite, vous vous trompez de débat. (Applaudissements sur quelques bancs du
groupe LR. – M. Fabrice Le Vigoureux applaudit
également.)
M. Bruno
Millienne. Bravo !
M. Damien
Abad. Très bien !
M. le
président. La parole est à Mme Clémentine Autain.
Mme
Clémentine Autain. On aborde là le cœur d’un débat qui nous oppose. Pour
notre part, nous sommes convaincus qu’il existe un lien entre le marché du
travail – c’est-à-dire la répartition du travail et des revenus pendant la
période d’activité – et la retraite, ne serait-ce que parce que les
cotisations permettant de payer les retraites sont clairement liées à l’état du
marché du travail. Voilà notre premier point de divergence.
Le deuxième,
c’est que nous voulons réduire le temps de travail pour lutter contre le
chômage. Nous estimons que, durant la période qui a suivi le passage aux
35 heures, des centaines de milliers d’emplois ont été créés, alors qu’on
n’avait jamais observé un tel bond pendant des décennies. C’est pourquoi nous
sommes favorables à la semaine de 32 heures. Deux autres arguments plaident
en ce sens.
Je pense d’abord au modèle de développement économique que
nous souhaitons promouvoir : à l’heure où l’environnement et le
réchauffement climatique sont des préoccupations majeures, prôner la réduction
du temps de travail, c’est défendre une certaine conception de la croissance,
critique de la croissance productiviste et de ses travers.
Par ailleurs,
l’avènement de l’égalité entre les hommes et les femmes nécessite une réduction
massive du temps de travail pour permettre un meilleur partage entre, d’une
part, le temps parental et domestique, et, d’autre part, les autres temps, à
savoir ceux de la vie associative, syndicale ou politique.
M. Bruno
Millienne. En gros, vous ne voulez pas bosser !
Mme
Clémentine Autain. C’est tout un projet de société que nous défendons,
et il est nécessairement corrélé au présent projet de loi car il a un impact sur
le fonctionnement du régime de retraite. C’est pourquoi nous sommes très
favorables à ces amendements.
M. le
président. La parole est à M. Hervé Saulignac.
M. Hervé
Saulignac. Tout à l’heure, lorsque l’amendement de notre collègue Benoit
a été adopté – mon groupe n’a pas pris part au vote –, il m’a semblé
que certains ici se sont imaginé que tous les enfants de France seraient
totalement réconciliés avec le système de retraite que vous leur préparez et
l’aborderaient en toute confiance. Il s’agissait pourtant d’un amendement
purement déclaratif, non pas vide de sens mais dépourvu d’effet.
Les
amendements que notre collègue Faucillon vient de défendre, qui vise à inscrire
dans le texte le principe d’un temps de retraite en bonne santé, nous paraît au
contraire afficher une réelle ambition sociale.
M. Bruno
Millienne. Il est complètement déclaratif, lui aussi !
M. Hervé
Saulignac. Je ne comprendrais pas qu’après avoir adopté l’amendement de
notre collègue Benoit, on rejette cet amendement, qui, je le crois, peut nous
rassembler, si chacune et chacune d’entre vous admet que l’objectif du projet
n’est pas seulement de réduire les dépenses que l’État consacre aux retraites,
mais aussi de permettre aux Français de disposer d’un temps de retraite en bonne
santé. Nous voterons donc pour ces amendements.
M. Régis
Juanico. Très bien !
M. le
président. La parole est à M. Frédéric Petit.
M. Frédéric
Petit. Je suis très surpris par la position du groupe La France
insoumise : ils ont expliqué vouloir financer les surcoûts induits par la
baisse de l’âge de la retraite et l’augmentation des pensions qui figurent dans
leur projet en y consacrant 2 points de PIB supplémentaires, mais ils
préconisent en même temps la baisse du PIB.
Mme
Clémentine Autain. Ce n’est pas ce que nous avons dit !
M. Frédéric
Petit. J’avoue avoir du mal à comprendre comment ils peuvent résoudre
cette énorme contradiction, qui apparaît également à la lecture de leur
projet,…
Mme Elsa
Faucillon. Cette intervention est-elle directement liée à l’amendement,
monsieur le président ?
M. Frédéric
Petit. …entre le financement du système, la création de richesses, et le
partage.
M. le
président. Vous vous éloignez quelque peu de l’objet de l’amendement,
monsieur Petit.
Mme Elsa
Faucillon. Ah ! Merci !
M. Frédéric
Petit. Mais non.
M. le
président. Concluez, je vous prie.
M. Frédéric
Petit. Le travail prescrit, je ne sais pas ce que c’est.
(Les sous-amendements nos 42441 et 42442,
successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(Les amendements no 26729 et
identiques ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Sur l’amendement no 26730 et les quinze
amendements identiques déposés par les membres du groupe de la Gauche démocrate
et républicaine, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et
républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans
l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Fabien
Roussel, pour soutenir ces amendements, qui font l’objet d’un sous-amendement,
no 42448.
M. Fabien
Roussel. Nous espérons qu’ils rassembleront largement, puisque nous
proposons d’intégrer à l’article 1er un septième objectif, qui
tient en sept mots : « égalité entre les femmes et les
hommes ».
Au cours de nos débats, depuis quelques jours, vous avez
proposé d’effectuer, de-ci de-là, quelques ajouts sémantiques. Certains ont été
acceptés, comme celui de notre collègue Benoit, dont vous avez estimé, monsieur
le rapporteur, qu’il avait une portée symbolique. Vous comprenez bien que
l’objectif dont nous proposons l’ajout est d’une tout autre ampleur : il
doit être constitutif de la réforme, tant sont fortes, en matière de pensions de
retraite, les inégalités entre hommes et femmes.
Vous prétendez que cette
réforme des retraites permettra des avancées. Nous en discuterons. Pour notre
part, nous avons des inquiétudes et des interrogations, notamment s’agissant de
la prise en compte de la maternité dans le calcul des pensions, puisque les
femmes perdront certains des trimestres auxquels elles ont droit à ce
jour.
L’alinéa que nous proposons d’ajouter au début du projet de loi
vise à réparer une grande injustice, qui ne devrait plus exister dans notre
société du XXIe siècle. (M. Stéphane Peu
applaudit.)
M. le
président. La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir le
sous-amendement no 42448.
M. Loïc
Prud’homme. L’égalité salariale entre les hommes et les femmes n’est
effectivement pas un sujet annexe. Elle figure même parmi les propositions que
nous avançons pour garantir l’équilibre du système à long terme, y compris au vu
des problèmes démographiques qui pourraient se poser dans le futur. Il suffit en
effet d’appliquer strictement l’égalité salariale entre hommes et femmes pour
faire entrer plus de 10 milliards d’euros de cotisations supplémentaires
dans les caisses du système de retraite.
M. Bruno
Millienne. Et comment on la fait, l’égalité ?
M. Loïc
Prud’homme. La question est donc loin d’être annexe. En plus d’être une
absolue nécessité sur le plan strictement sociétal, l’égalité salariale est
aussi un impératif économique.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur cette série
d’amendements identiques et sur le sous-amendement ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Sujet largement débattu : avis
défavorable.
Rappel au règlement
M. le
président. La parole est à M. Olivier Faure, pour un rappel au
règlement.
M. Olivier
Faure. Pour donner suite à ce que vous avez affirmé tout à l’heure,
monsieur le président, je viens de contacter Valérie Rabault, qui me
confirme ne pas avoir reçu copie du courrier que vous auriez adressé à
Mme Belloubet, et cette dernière nous indique elle-même ne pas avoir reçu
de courrier du président de l’Assemblée nationale. (Murmures.)
M. Damien
Abad. Est-ce bien le sujet du débat ?
M. Olivier
Faure. Je ne cherche pas à vous en faire le reproche, monsieur le
président. Je voudrais simplement savoir si vous pouvez nous assurer que ce
courrier sera officiellement transmis à Mme Belloubet demain.
(Protestations sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
M. le
président. Monsieur Faure, avant que la séance soit levée, avant que
vous et moi allions nous coucher, vous viendrez avec moi dans mon bureau et je
vous ferai moi-même une photocopie des courriers que j’ai fait parvenir à
Mme Rabault et à Mme la garde des sceaux. Peut-être arrêterez-vous
alors de troubler nos débats ! (Applaudissements sur les bancs du groupe
LaREM.) Croyez-vous que je vous mente ? Qu’est-ce que c’est que ce
comportement ? (Applaudissements et encouragements sur les bancs du
groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM.)
M. Olivier
Faure. Monsieur le président, si vous me permettez de finir,…
M. le
président. Moi, en tout cas, j’ai fini ! Et je ne vois pas le lien
avec nos débats !
M. Olivier
Faure. Si, il y a un lien. Et je ne vous ai pas agressé.
M. le
président. Si vous estimez que je vous mens, c’est agressif !
M. Olivier
Faure. Non, ce n’est pas agressif.
M. le
président. Le rappel au règlement est terminé car il est sans rapport
avec la discussion en cours ! (Applaudissements sur les bancs du groupe
LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)
M. Olivier
Faure. Absolument pas…
M. Fabien
Roussel. Il est inadmissible que vous parliez ainsi !
M. le
président. Monsieur Faure, je vais demander que les copies des documents
que vous demandez me soient apportées et je vous les remettrai ! Ça suffit,
maintenant !
M. Olivier
Faure. C’est un rappel au règlement sur un problème essentiel et vous
m’avez coupé la parole ! C’est inadmissible !
M. le
président. Ça fait deux fois que je vous dis que ce foutu courrier est
parti ! Faire un rappel au règlement pour un problème de courrier, tout de
même !
La parole est à M. Fabien Roussel.
M. Fabien
Roussel. Monsieur le président, je demande une suspension de
séance.
Suspension et reprise de la séance
M. le
président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures, est reprise à vingt-trois
heures dix.)
M. le
président. La séance est reprise.
Monsieur Faure, vous avez mis
en doute la parole que je vous ai donnée, non pas en mon nom personnel, mais en
ma qualité de président de l’Assemblée nationale, quand je vous ai assuré que
j’avais saisi la garde des sceaux de la demande de Mme Valérie Rabault en
vue de créer une demande de commission d’enquête. Je prie les huissiers de vous
remettre immédiatement la copie du courrier que j’ai adressé, le
18 février, à Mme la garde des sceaux et de celui que j’ai adressé, à
la même date, à Mme Rabault.
Je considère que l’incident est clos
mais que vous devez, à tout le moins, des excuses, non pas à Richard Ferrand,
mais au président de l’Assemblée nationale, pour avoir mis en doute son
honnêteté. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM ainsi
que sur quelques bancs des groupes UDI-Agir et LT. – Plusieurs députés se lèvent
et continuent d’applaudir.)
La parole est à M. Olivier
Faure.
M. Olivier
Faure. Monsieur le président, il n’est pour moi nullement question de
remettre en cause la présidence de l’Assemblée. Quand je vous pose une question,
c’est aussi ès qualités : c’est la question d’un parlementaire de
l’opposition qui s’inquiète de savoir si le courrier qui doit permettre de créer
la commission d’enquête a bien été remis. Quand je vous dis que nous n’avons pas
eu connaissance du fait que Mme la garde des sceaux l’ait reçu, puis, après
vérification auprès de Mme Rabault, que je vous confirme qu’elle n’a pas
reçu copie de la réponse, je vous prie de me croire. Si je vous pose à nouveau
la question et que vous me remettez ces documents, je vous en donne acte bien
volontiers. Demain, nous vérifierons auprès de Mme Belloubet quelles sont
les raisons pour lesquelles elle n’a pas encore répondu.
L’incident est
clos, mais je vous prie de croire aussi qu’il n’est pas très agréable de se
faire rabrouer comme vous venez de le faire depuis le fauteuil de la présidence,
alors que je vous posais une question ouverte, sans aucun esprit…
(Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le
président. Veuillez laisser s’exprimer M. Faure.
M. Olivier
Faure. Merci, monsieur le président. J’entends simplement faire
respecter les droits de l’opposition, dont vous êtes vous-même le garant.
M. le
président. Vous en avez la preuve.
M. Damien
Abad. C’est fini, le congrès du PS ? Peut-on reprendre les
débats ?
Article 1er (suite)
M. le
président. La parole est à M. Fabien Roussel.
M. Fabien
Roussel. Le rejet de notre amendement n’a pas fait l’objet
d’explications de la part du rapporteur et du ministre. On nous a reproché
d’avoir déposé des amendements dépourvus de sens, limités à des mots ou des
virgules, pour faire de l’obstruction. Or, avec celui-ci, nous proposons
d’ajouter une ligne pour affirmer l’objectif d’égalité entre les femmes et les
hommes, objectif important. Je regrette donc que cet ajout soit rejeté d’un
revers de main par le rapporteur et le ministre.
M. le
président. La parole est à Mme Michèle de Vaucouleurs.
Mme Michèle
de Vaucouleurs. L’égalité entre les hommes et les femmes se trouve
évidemment au cœur de nos préoccupations. Vous n’êtes pas sans savoir que nous
nous sommes attachés à venir à bout des discriminations salariales dans les
entreprises. Celles qui emploient plus de cinquante salariés ont désormais
obligation de publier un index et, si l’égalité n’est pas respectée, de prendre
des mesures correctives. En l’absence de mesures correctives, des contrôles ont
lieu, lesquels, s’ils établissent de véritables discriminations, peuvent
conduire à des sanctions civiles ou pénales, pouvant aller jusqu’à
3 750 euros d’amende et un an de prison. Comment comptons-nous
parvenir à une égalité entre les hommes et les femmes s’agissant des
retraites ? Tout simplement en parvenant à une égalité sur les salaires.
(Applaudissements sur les bancs d groupe MODEM et sur quelques bancs du
groupe LaREM.)
M. Bruno
Millienne. Bravo !
M. le
président. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier
Véran, ministre. Je ne voulais pas laisser votre interpellation
sans réponse, monsieur Roussel. Si je me suis permis de donner un avis
défavorable à votre amendement – et je pense que M. le rapporteur l’a
fait pour la même raison –, c’est tout simplement parce qu’il est
satisfait, à l’alinéa 6 de l’article 1er, qui prévoit, de
façon explicite, que la réforme vise à la résorption des écarts de retraites
entre les femmes et les hommes. Il s’agit d’une une mesure favorable, qui va
dans le sens de ce que vous souhaitiez.
Je n’ai d’ailleurs pas compris
pourquoi vous aviez déposé un amendement de suppression de l’alinéa 6, qui
va dans le sens de ce que vous souhaitez ajouter à l’alinéa 9.
(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) S’agit-il
d’un problème arithmétique ? À moins qu’animé par une volonté systématique
de supprimer une à une toutes les lignes du texte, vous n’ayez pas vu que vous
vouliez supprimer quelque chose pour nous demander de l’ajouter un peu plus
loin ?
M. Stéphane
Peu. Si vous voulez revenir à l’alinéa 6, on va le faire !
M. Olivier
Véran, ministre. En tous les cas, puisque vous m’en donnez
l’occasion, je réaffirme ici que le système universel des retraites va permettre
d’augmenter la retraite moyenne des futures femmes retraitées d’environ 6 %
pour la génération 1980 et 13 % pour la génération 1990. La retraite
moyenne augmentera pour les hommes de 6 % en ce qui concerne la génération
1990 et restera inchangée pour la génération 1980, ce qui permettra de résorber
l’écart de niveau de pension entre les femmes et les hommes.
Petit à
petit, je ne désespère pas que nous finissions par vous convaincre de voter en
faveur de l’article 1er. (Applaudissements sur les bancs des
groupes LaREM et MODEM.)
M. Stéphane
Peu. On revient donc sur l’alinéa 6 ? On peut ?
(Le sous-amendement no 42448 n’est pas
adopté.)
M. le
président. Je mets aux voix les amendements nos 26730 et
identiques.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le
président. Voici le résultat du
scrutin :
Nombre de
votants 93
Nombre
de suffrages
exprimés 82
Majorité
absolue 42
Pour
l’adoption 11
Contre 71
(Les amendements nos 26730 et
identiques ne sont pas adoptés.)
M. le
président. La parole est à M. Alain Bruneel, pour soutenir
l’amendement no 26984 et les quinze amendements identiques
déposés par les membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, qui
font l’objet de deux sous-amendements, nos 42456 et 42454.
M. Alain
Bruneel. Puisque nous discutons toujours des grands principes, nous
souhaiterions aussi connaître, car cela n’apparaît pas dans le texte, le montant
du taux de remplacement après l’entrée en vigueur de la réforme. Ces amendements
identiques visent à inscrire parmi les objectifs du système de retraite notre
proposition de garantir un taux de remplacement de 75 % du dernier salaire.
Vous le savez, le taux de remplacement s’élève actuellement à 75 % du
salaire moyen des six derniers mois d’activité dans la fonction publique, et à
50 % du salaire moyen des vingt-cinq meilleures années dans le secteur
privé.
Nous ne savons pas quel sera ce montant avec votre réforme, car
son principe est de rendre le droit à la retraite imprévisible et de ne donner
aucune garantie sur le taux de remplacement, ce qui est quand même fort de café.
Permettez-nous donc de vous interroger, car nous voyons bien ce qui va advenir
pour les salariés et les retraités. Âge d’équilibre, valeur d’acquisition du
point, valeur de service du point, indexation des pensions liquidées, décote et
surcote : tous les droits sont modifiables à tout moment ! C’est
pourquoi nous souhaitons garantir un taux de remplacement à 75 %.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.)
M. le
président. La parole est à Mme Clémentine Autain, pour soutenir les
sous-amendements nos 42456 et 42454, qui peuvent faire l’objet
d’une présentation groupée.
Mme
Clémentine Autain. Ils visent à préciser dans la loi le taux de
remplacement qui sera en vigueur, car, pour l’heure, comme l’a dit mon collègue
communiste, c’est le flou le plus artistique : nous ne savons absolument
pas quel taux de remplacement sera garanti. Nous y voyons malheureusement un peu
plus clair s’agissant de la fonction publique puisque nous savons que le taux de
remplacement devrait immédiatement chuter de 32 %, ce qui représente
littéralement un choc qui ne sera évidemment pas compensé par les quelques
milliards que vous semblez disposés à mettre sur la table mais qui ne sont pas
gravés dans le marbre de la loi.
Nous l’avons dit à plusieurs reprises,
il est évident que, si l’on calcule le montant de la pension sur l’ensemble de
la carrière dans le privé et non plus sur les vingt-cinq meilleures années, le
taux de remplacement baissera. Par ces sous-amendements, nous cherchons donc à
ce que soit précisé le montant du taux de remplacement garanti, alors que nous
passons d’un régime au sein duquel des prestations étaient garanties à un autre
où seul le niveau des cotisations le sera ; c’est ce que nous contestons
fondamentalement dans le régime par points que vous souhaitez
instaurer.
Nous avons également dit à plusieurs reprises que nous
souhaitons des garanties en matière de droits, de protection et de taux de
remplacement. C’est pourquoi nous signons les amendements identiques des deux
mains et que nous voulons ajouter un terme permettant de dire l’enjeu majeur que
représente le taux de remplacement.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur cette série
d’amendements identiques et sur les sous-amendements ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Une fois encore, il s’agit d’un sujet dont
nous avons déjà largement parlé. Monsieur Bruneel, je pense que vous confondez
taux de remplacement et taux de liquidation. Il existe actuellement un taux de
liquidation qui peut s’élever, dans le régime général, à 50 % sur la
moyenne des vingt-cinq meilleures années dans le secteur privé et à 75 %
sur la moyenne des six derniers mois dans la fonction publique. Notons que, pour
obtenir le taux de remplacement, il est nécessaire d’ajouter les primes ou les
points AGIRC-ARRCO – Association générale des institutions de retraite
complémentaire des cadres et Association pour le régime de retraite
complémentaire des salarié – selon le secteur ; le calcul n’est donc
pas aussi évident que cela dans le système actuel, loin de là.
J’ai fait,
hier soir tardivement et ce matin, la démonstration selon laquelle, comme le
système actuel et celui que nous souhaitons instaurer représentent des sommes
d’argent similaires – environ 325 milliards d’euros provenant à
80 % des cotisations et à 20 % de l’impôt –, nous devrions
obtenir les mêmes niveaux de pension en moyenne. En revanche, comme nous œuvrons
en faveur de la redistribution, certains assurés obtiendront une pension plus
importante quand d’autres en percevront une plus faible.
Tel que vous
formulez votre amendement, vous parlez d’« un taux de remplacement des
pensions à 75 % rapporté aux derniers salaires perçus ». Or, si l’on
pousse l’analyse un peu plus loin, la personne qui aurait travaillé les six
derniers mois ou même les deux dernières années avant sa retraite obtiendrait
75 % au même titre que quelqu’un qui aurait travaillé une carrière entière.
Nous souhaitons, pour notre part, que la retraite soit le reflet de l’ensemble
de la carrière et essayer, grâce à la solidarité que nous instaurons, apporter
une compensation à ceux qui ont les plus faibles pensions.
L’avis est
donc défavorable.
M. le
président. La parole est à M. Éric Woerth.
M. Éric
Woerth. Il est important de savoir si nous pouvons ou non garantir un
taux de remplacement. Un taux de remplacement est aujourd’hui affiché, mais,
entre nous, il a plutôt tendance à baisser au fil du temps. Il est garanti au
niveau du SMIC puis commence à baisser en remontant sur l’échelle des salaires.
Du reste, plus vous garantirez un haut taux de remplacement au niveau du SMIC,
plus il sera difficile à gérer sur l’ensemble de l’échelle des salaires car,
tout comme il existe une échelle des salaires, il existe une échelle des
retraites.
Deuxièmement, il convient de garantir l’équilibre financier
d’un système dans lequel la nation décide de consacrer beaucoup d’argent. Quand
on parle de points de pourcentage de PIB – 13, 14 ou 15 % –, il
s’agit de la meilleure manière de dire quel niveau de richesse nous sommes
capables de consacrer au système de retraite. Cela étant, ce système doit
évidemment être équilibre car ici réside la véritable justice : de
l’équilibre dépend la capacité à verser des pensions.
Pour que ces
pensions soient bonnes et qu’elles soient en relation avec le salaire, il est
évidemment nécessaire que le niveau de qualification des Français augmente. Vous
parliez des inégalités entre les hommes et les femmes ; la vérité est
qu’elles reflètent des carrières qui sont elles-mêmes inégales. C’est pour cette
raison et pas pour une autre qu’il existe une inégalité en matière de
retraites.
Nous constatons progressivement, avec des générations dans
lesquelles hommes et femmes travaillent de la même manière et des écarts de
salaire qui diminuent – certes pas encore suffisamment –, que la
qualification et la nature des carrières constituent la meilleure garantie pour
obtenir des retraites équivalentes. Il convient donc d’avoir le courage de
prendre les mesures en adéquation avec cette ambition, sachant que, pour
garantir l’équilibre financier du système, il faut avoir le courage d’augmenter
l’âge de départ à la retraite. Vous ne pouvez pas ne pas vouloir les mesures et,
en même temps, vouloir les résultats.
Enfin, l’augmentation des salaires
ne peut venir que des qualifications. Un décret ne saurait prévoir une
augmentation des salaires pour permettre de plus hautes pensions, c’est à la
hauteur d’un enfant en classe de CP. Une telle action comporterait de lourdes
conséquences, insupportables pour la compétitivité du pays et donc pour le
système de retraite.
(« Ah ! », sur les
bancs du groupe FI.)
(Les sous-amendements nos 42456 et 42454,
successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(Les amendements nos 26984
et identiques ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Sur l’amendement no 27000 et les quinze
amendements identiques déposés par le groupe de la Gauche démocrate et
républicaine, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine
d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte
de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Fabien Roussel, pour
soutenir les amendements, qui font l’objet de deux sous-amendements,
nos 42457 et 42458.
M. Fabien
Roussel. Vous n’avez pas voulu retenir notre proposition d’inscrire
parmi les objectifs énoncés à l’article 1er l’égalité de pension
entre les femmes et les hommes, et nous le regrettons. Peut-être retiendrez-vous
ce que nous vous proposons ici : reconnaître la pénibilité des métiers des
carrières longues, en insérant un nouvel alinéa dans votre
loi.
Pourquoi ? Parce que, sur le sujet de la pénibilité, nous avons
de lourdes inquiétudes, dont nous avons déjà parlé. Vous comptez mettre fin au
départ anticipé dans la fonction publique, actuellement fixé à 52 ans pour
la catégorie super-active et à 57 ans pour la catégorie active. Vous ne
prévoyez ainsi que 300 000 nouveaux bénéficiaires, quand
600 000 fonctionnaires sont concernés à ce jour.
Quant aux
travailleurs effectuant une carrière longue, l’exposé des motifs de votre projet
de loi prévoit de « limiter les effets de l’anticipation de leur départ sur
le montant de [leur] retraite […] calculée avec un âge d’équilibre abaissé de
deux années ». En d’autres termes, cela signifie que les personnes qui
devraient bénéficier d’un départ à la retraite pour carrière longue subiront une
décote de 10 %, ce que nous regrettons.
C’est pourquoi nous vous
proposons, à l’article 1er, parmi les objectifs de la réforme,
de tenir compte de la pénibilité des carrières longues.
(M. Stéphane Peu applaudit.)
M. le
président. La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir les
sous-amendements nos 42457 et 42458, qui peuvent faire l’objet
d’une présentation groupée.
Mme
Caroline Fiat. Je n’étais pas présente cet après-midi mais, comme je
suis d’assidue, je vous ai écouté depuis mon bureau, monsieur le ministre.
Lorsque le sujet de la pénibilité a été évoqué, vous avez répondu à mes
collègues en évoquant le C2P – compte professionnel de prévention. Monsieur
le secrétaire d’État Pietraszewski m’a aimablement transmis un document sur ce
sujet. Or vous avez dit tout à l’heure, monsieur le ministre, que le C2P
permettrait d’offrir une formation de six mois.
M. Olivier
Véran, ministre. Oui.
Mme
Caroline Fiat. J’aimerais que nous soyons bien d’accord sur les
mots : le C2P n’offre pas une formation car, si je reprends le document qui
m’a été communiqué, il sera nécessaire d’utiliser 40 points pour accéder à
cette formation ; ce n’est donc pas l’État qui offrira cette formation de
six mois puisqu’elle coûtera 40 points. Et il sera possible de recourir au
CPF – compte personnel de formation – à hauteur de
7 500 euros, qui équivaudront 20 points. Il faut donc faire
attention et ne pas commencer à faire croire aux gens qu’ils bénéficieront de
formations gratuites alors qu’il sera nécessaire d’utiliser des points pour y
avoir accès. Monsieur Véran, vous connaissez ma pugnacité : quelle
formation existe, dans notre République, pour changer de profession en six
mois ?
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur cette série
d’amendements identiques et sur les sous-amendements ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. S’agissant des sous-amendements, je n’ai
pas bien compris le rapport entre votre intervention, madame Fiat, et l’objectif
visé par les amendements. Les points dont vous avez parlé sont non pas des
points retraite, mais des points pénibilité ?
Mme
Caroline Fiat. Oui !
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Je ne vois pas trop de quoi il
retourne.
J’en viens aux amendements, qui visent à insérer, après
l’alinéa 10, un objectif de reconnaissance de la pénibilité. Monsieur
Roussel, je vais vous faire la même réponse, mais moins bien ciselée, que le
ministre : vous avez souhaité supprimer l’alinéa 6, qui intègre cette
dimension ; il s’agirait donc simplement de déplacer la disposition dans le
texte. J’émets un avis défavorable.
M. le
président. La parole est à Mme Carole Grandjean.
Mme Carole
Grandjean. Je tiens à rappeler ce que nous avons réalisé au cours de la
législature, car il est assez inacceptable d’entendre, de la part de nos
collègues, que nous ne serions pas totalement déterminés à parvenir à une
égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.
M. Gilles
Le Gendre. Très juste !
Mme
Caroline Fiat. Cela n’a rien à voir avec les amendements !
Mme Carole
Grandjean. Qui a fait voter, au titre III de la loi pour la liberté
de choisir son avenir professionnel, l’obligation de résultat en matière
d’égalité salariale entre les femmes et les hommes ? C’est nous !
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM. –
Exclamations sur les bancs des groupes GDR et FI.)
L’objectif que
nous partageons tous, je crois, dans cet hémicycle, est de résorber l’écart de
42 % entre les pensions de retraite des femmes et celles des hommes.
L’enjeu est donc d’adopter des mesures d’égalité à cette fin.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le
président. Les amendements que nous examinons portent sur les carrières
longues, madame Grandjean. Nos collègues de La France insoumise ont eu le temps
de s’indigner sur Twitter du fait qu’elles seraient privées de parole parce que
je leur ai rappelé qu’il ne faut pas s’éloigner de l’objet des amendements.
Comme vous abordez un autre sujet, elles allaient s’indigner plus encore.
Veillons collectivement à rester concentrés sur le sujet en discussion. Je l’ai
dit à Mme Autain, et cela vaut aussi pour vous, madame Grandjean.
Mme
Clémentine Autain. Comme c’est gentiment dit !
Mme Elsa
Faucillon. Vous vous moquez de nous ! C’est méprisant, monsieur le
président !
M. le
président. Ce n’est pas méprisant du tout. J’ai simplement rappelé la
règle à l’attention de toutes et tous.
Mme Carole
Grandjean. Et j’accepte cette règle.
Mme Elsa
Faucillon. Il y a la manière de le dire !
M. le
président. La parole est à Mme Caroline Fiat.
Mme
Caroline Fiat. Je l’ai déjà relevé plusieurs fois, dès que nous faisons
un petit pas de côté, nous sommes tout de suite remis dans le droit chemin. Pour
d’autres, l’application de la règle est moins immédiate – je ne dis pas
cela seulement pour vous, monsieur le président, il en est ainsi depuis
plusieurs jours. Pour ma part, j’ai bien compris la règle et j’essaie de m’y
tenir.
M. Raphaël
Schellenberger. C’est de la soumission !
Un autre député du groupe
LR. C’est La France soumise !
Mme
Caroline Fiat. Depuis le début de la semaine – je prends à témoin
tous les collègues présents –, je fais beaucoup d’efforts pour rester
zen…
M. le
président. Et moi donc…
Mme
Caroline Fiat. …et respecter les règles lorsque je défends mes
amendements. (Exclamations sur divers bancs.) En l’espèce, alors que j’ai
parlé du sujet en discussion, la pénibilité, vous m’avez fait une petite réponse
taquine, monsieur le rapporteur. Néanmoins, j’ai beaucoup d’humour et je ne vous
en fais pas grief. (Mêmes mouvements.)
M. Raphaël
Schellenberger. On voit la connivence entre La France insoumise et la
majorité !
M. le
président. S’il vous plaît !
Mme
Caroline Fiat. Monsieur le ministre, je vous ai posé une question assez
précise. Comme vous n’avez pas vu le document que je vous montrais tout à
l’heure, je vous le montre à nouveau – discrètement, car ce n’est pas
autorisé dans l’hémicycle. J’aimerais bien, s’il vous plaît – je prends le
soin d’être polie –,…
M. Raphaël
Schellenberger. C’est vraiment de la connivence !
Mme
Caroline Fiat. …obtenir une réponse d’ici à la fin de la soirée ;
ce serait fort agréable. (Exclamations sur les bancs du groupe
LR.)
(Les sous-amendements nos 42457 et 42458,
successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Je mets aux voix les amendements no 27013 et
identiques.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le
président. Voici le résultat du
scrutin :
Nombre de
votants 90
Nombre
de suffrages
exprimés 82
Majorité
absolue 42
Pour
l’adoption 10
Contre 72
(Les amendements no 27013 et
identiques ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Je suis saisi d’un amendement no 27533 et de
quinze amendements identiques déposés par le groupe de la Gauche démocrate et
républicaine, qui font l’objet de deux sous-amendements,
nos 42469 et 42470.
Sur les amendements, je suis saisi
par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin
public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée
nationale.
La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir les
amendements.
Mme Elsa
Faucillon. Nous ne voyons pas, je l’avoue, comment le calcul de la
pension sur la base de l’ensemble de la carrière pourrait se révéler plus
favorable que celui sur la base des vingt-cinq meilleures années ; les
débats en commission ne nous ont guère convaincus à ce sujet.
Née après
1975, ma génération sera touchée par votre réforme. Or nous avons l’expérience
d’une réforme précédente : nous avons constaté que le passage des dix
meilleures années aux vingt-cinq meilleures années n’avait guère été favorable
pour ce qui concerne le niveau des pensions de nos parents. Le calcul sur la
base de l’ensemble de la carrière le sera moins encore.
Nous souhaitons
ici d’inscrire, à l’article 1er, l’objectif d’une retraite
calculée sur la base des meilleures années travaillées. Nous proposerons, par la
suite, de revenir à la règle des dix meilleures années pour les salariés du
privé.
M. le
président. La parole est à M. Loïc Prud’homme, pour soutenir les
sous-amendements nos 42469 et 42470, qui peuvent faire l’objet
d’une présentation groupée.
M. Loïc
Prud’homme. M. Woerth a fait référence tout à l’heure au niveau
d’un élève de CP. En l’espèce, un élève de CE2 comprendrait aisément que
l’extension à l’ensemble de la carrière de la durée prise en compte pour le
calcul des pensions fera mathématiquement baisser leur niveau ; c’est
inéluctable. Il va de soi que la prise en compte des meilleures années
– même s’il y a déjà eu un recul avec le passage des dix aux vingt-cinq
meilleures années – garantit un taux de remplacement plus élevé,
conformément à ce que nous réclamions par les amendements précédents.
Par
conséquent, il me semble utile de préciser que l’objectif du système de retraite
est de garantir un certain taux de remplacement, contrairement à ce que le
ministre et le rapporteur affirment, ce qui implique que la pension soit
calculée sur la base des meilleures années de salaire. Si nous décidons qu’elle
l’est sur la base des dix meilleures années, nous pourrons ensuite trouver une
convergence entre le public et le privé, en retenant soit la règle des six
derniers mois pour tous, soit celle des dix meilleures années pour
tous.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur cette série
d’amendements identiques et sur les sous-amendements ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Nous avons discuté du sujet à de nombreuses
reprises mais je me permettrai de rappeler quelques
éléments.
Premièrement, si l’on retient la règle des six derniers mois
pour tous, sachant qu’il faudra répartir la même somme entre les pensionnés,
tout le monde ne sortira pas gagnant des arbitrages.
Deuxièmement, pour
atténuer les évolutions, nous voulons revaloriser les pensions en fonction non
plus de l’inflation, mais des revenus. Notons que, sur vingt-cinq ans, entre
1993 et 2018, il y a eu un écart de 30 % entre la croissance des prix et
celle des revenus.
M. Prud’homme a fait référence à un élève de CM2.
M. Quatennens avait déjà évoqué le cas d’un enfant de dix ans dont les
notes du dernier trimestre sont supérieures à sa moyenne sur l’année, après quoi
j’avais pris un exemple similaire : lorsqu’on a été membre d’un conseil
d’école, on sait qu’un enfant dont les parents se séparent au mois de février
obtient des notes beaucoup moins bonnes en fin d’année, et, dans ce cas, il est
préférable de prendre en compte sa moyenne du début de l’année.
Mme
Caroline Fiat. Quel est le rapport ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Autrement dit, dans la vie d’un salarié, il
peut se produire des accidents de carrière ou liés à une séparation ou à une
maladie. Compte tenu du mode de revalorisation actuel, la prise en compte des
vingt-cinq meilleures années en début de carrière peut avoir une forte incidence
à la baisse sur la pension. J’émets donc un avis défavorable.
(Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du
groupe LaREM. – Conciliabules sur les bancs des groupes SOC et
FI.)
M. le
président. La parole est à M. Loïc Prud’homme.
M. Loïc
Prud’homme. Nous n’allons pas débattre du CE2 et du CM1, monsieur le
rapporteur… En revanche, il y a un problème de compréhension : nous parlons
non pas des dernières années ou des dernières notes, mais bien des meilleures
années ou des meilleures notes.
Mme
Caroline Fiat. Eh oui !
M. Hervé
Saulignac. Absolument, il faut être précis !
M. Loïc
Prud’homme. Votre exemple est d’ailleurs parfait : si nous
souhaitons que les meilleures années ou les meilleures notes soient retenues,
c’est effectivement pour ne pas avoir à prendre en compte les dernières, qui
peuvent être moins bonnes. Retenir les meilleures permet de lisser. Qu’il
s’agisse de vingt-cinq années, de dix années ou de six mois, prenons la
meilleure période !
Par ailleurs, vous dites que, si l’on retient la
règle des six derniers mois pour tous, cela coûtera de l’argent. Dont acte.
Cependant, il est assez facile de trouver cet argent. L’année dernière, les
entreprises du CAC40 ont versé 56 milliards de dividendes à leurs
actionnaires.
M. Bruno
Millienne. Ah ! Nous y voilà !
M. Loïc
Prud’homme. Notre pays est champion d’Europe en la matière. Il y a donc
des ressources. L’application de l’égalité salariale entre les femmes est les
hommes procurerait 11 milliards d’euros de cotisations supplémentaires, et
une augmentation des salaires de 1 point ferait rentrer quelques milliards
dans les caisses. Le problème n’est pas le financement.
Pour revenir à la
distinction entre les dernières années et les meilleures années, monsieur le
rapporteur, je pense que vous avez un problème avec les mathématiques. J’ignore
s’il est de niveau CE2 ou CM1…
M. le
président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme
Marie-Christine Dalloz. J’ai écouté attentivement vos arguments,
monsieur le rapporteur. Vous cherchez à répondre à nos inquiétudes, mais, hélas,
vous les aggravez.
Une carrière est nécessairement ascendante…
M. Pascal
Lavergne. Pas toujours.
Mme
Marie-Christine Dalloz. …car on gagne plus en fin qu’en début de
carrière. Jusqu’à présent, avec la règle des vingt-cinq meilleures années pour
les salariés du privé, cette ascension était forcément prise en compte. En
revanche, il est quasi impossible de trouver un parcours de quarante années qui
ne soit pas heurté.
Prenant l’exemple d’un élève dont les notes chutent
en fin d’année à la suite du divorce de ses parents en février, vous dites qu’il
faut prendre en compte sa moyenne. Or c’est bien cela notre inquiétude :
sous couvert de compenser les accidents de carrière, vous allez mettre à mal
l’ensemble d’une carrière. La solidarité nationale doit permettre de pallier les
carrières heurtées.
M. Fabien
Roussel. Exactement ! C’est aussi simple que cela !
Mme
Marie-Christine Dalloz. La garantie que vous proposez entraînera
nécessairement une chute du niveau des pensions. Telle est la réalité.
M. le
président. La parole est à Mme Elsa Faucillon.
Mme Elsa
Faucillon. Mon intervention ne sera guère originale. Une règle
mathématique s’applique. Nous avons déjà été confrontés à cette incompréhension,
un collègue nous ayant même répondu qu’il fallait changer la règle car elle
n’était pas intuitive. Nous parlons bien des meilleures années. Quand on retient
de mauvaises années et qu’on les additionne à d’autres années, on fait chuter la
moyenne. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement ; c’est une
règle mathématique qui s’impose à nous. Dans le public, en revanche, les six
derniers mois sont évidemment la meilleure période de la
carrière.
L’objectif visé par nos amendements serait, je l’ai dit,
décliné dans la suite du projet de loi. Nous proposons d’en revenir à la règle
des dix meilleures années dans le privé, car le passage des dix aux vingt-cinq
meilleures années a entraîné une chute des pensions, de 6 % au
minimum.
M. le
président. La parole est à M. Olivier Faure.
M. Olivier
Faure. Je souhaite à mon tour poser quelques questions au rapporteur car
nous avons bien du mal à comprendre à quelles règles il fait référence. Nous
parlons non pas des dernières années, mais des meilleures années, et la moyenne
doit se faire sur la base des années les plus profitables au
salarié.
Considérons la vie d’un salarié qui entre aujourd’hui sur le
marché du travail. En moyenne, il obtiendra un emploi pérenne, en CDI, vers
29 ans. Auparavant, il aura enchaîné des stages, des petits boulots, des
périodes d’intérim, des CDD. Si l’on s’intéresse maintenant aux actifs de
62 ans, on observe que, malheureusement, seule la moitié d’entre eux a
encore un emploi. En réalité, la durée de vie professionnelle dans de bonnes
conditions est de vingt-cinq à trente ans.
Si vous prenez la moyenne de
l’ensemble de la vie professionnelle, il est évident que vous faites chuter le
résultat. C’est le reproche que nous adressons à votre projet : il minorera
les pensions, et non l’inverse. Vous affichez dans les médias l’objectif d’être
plus favorables à l’égard des personnes dont les carrières ont connu des heurts,
mais nous sommes bien en peine de comprendre comment.
M. le
président. La parole est à Mme Michèle de Vaucouleurs.
Mme Michèle
de Vaucouleurs. Quel est l’intérêt de choisir le système par points et
de ne pas s’arrêter aux vingt-cinq meilleures années ? C’est de prendre en
compte des périodes qui ne l’étaient pas jusqu’à présent.
M. Loïc
Prud’homme. C’est défavorable !
Mme Michèle
de Vaucouleurs. Nous pourrons intégrer au calcul des jobs d’étudiants ou
le travail des femmes de ménage employées dix heures par semaine.
(M. Gilles Le Gendre applaudit.)
Mme
Caroline Fiat. Non, parce que cela fera moins de 150 heures dans le
mois !
Mme Michèle
de Vaucouleurs. En outre, des solidarités nouvelles seront instaurées
puisque nous créerons des points pour des situations qui n’ouvrent aujourd’hui
pas de droits, comme les aidants ou les naissances dès le premier enfant.
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) Les
mécanismes de solidarité seront renforcés et toutes les périodes de travail
seront prises en considération. (Applaudissements sur plusieurs bancs des
groupes LaREM et MODEM. – Exclamations sur les bancs des groupes LR, FI et
GDR.)
Mme
Marie-Christine Dalloz. Ce n’est pas possible !
M.
Dominique Potier. Personne n’y croit !
M. le
président. La parole est à M. Nicolas Turquois.
M. Nicolas
Turquois. Merci de m’accorder ce temps de parole, monsieur le président,
car je crois que certaines précisions méritent d’être apportées.
Il est
vrai qu’on peut, de prime abord, avoir l’impression que les vingt-cinq
meilleures années ne sont pas nécessairement les dernières.
M. Loïc
Prud’homme. Ce n’est pas une impression ! C’est
mathématique !
M. Nicolas
Turquois. Imaginons quelqu’un qui aurait eu un accident en fin de
carrière et dont les vingt-cinq meilleures années sont assez lointaines au
moment de liquider ses droits. Pour filer l’exemple de l’élève, disons qu’il
aurait obtenu un 15/20. Le décalage entre l’inflation et les salaires induit un
abattement de 30 % : avec la revalorisation telle qu’elle existe, la
note est ramenée à 10/20. Mathématiquement, le résultat n’est donc pas aussi
évident.
Par ailleurs, concernant les six derniers mois des
fonctionnaires, le calcul des droits n’intègre pas les primes,…
M. Loïc
Prud’homme. Alors réévaluez la grille !
M. Nicolas
Turquois. …alors qu’elles représentent en moyenne 22 % de la
rémunération.
Mme
Caroline Fiat. Ce n’est pas vrai !
M. Nicolas
Turquois. De façon surprenante, avec le calcul de 75 % hors primes,
le taux de conversion constaté est le même que pour les salariés du régime
général, avec un taux de 50 % appliqué aux vingt-cinq meilleures années.
Comme quoi votre analyse n’est pas aussi pertinente qu’il y
paraît.
M. Faure a évoqué les petits boulots. Il est vrai qu’ils
n’apportent pas de valeur au compte ; parfois même, ils ne valident pas de
trimestres puisqu’ils représentent moins de 150 heures par mois.
M. Frédéric
Petit. Eh oui !
M. Nicolas
Turquois. Or, s’il vous manque des trimestres, vous subissez une décote.
(M. Gilles Le Gendre applaudit.)
(Les sous-amendements nos 42469 et 42470,
successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le
président. Je mets aux voix les amendements no 27526 et
identiques.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le
président. Voici le résultat du
scrutin :
Nombre de
votants 80
Nombre
de suffrages
exprimés 74
Majorité
absolue 38
Pour
l’adoption 13
Contre 61
(Les amendements
no 27526 et identiques ne sont pas
adoptés.)
M. le
président. La parole est à M. Christophe Bouillon, pour soutenir
l’amendement no 23854, qui fait l’objet d’une série de
sous-amendements.
M.
Christophe Bouillon. Il vise à garantir deux droits : le droit à
l’information et le droit de recours pour les assurés sur toute décision
relative à leur retraite.
Si l’article 12 prévoit certaines
dispositions en matière d’information, elles demeurent limitées du fait du
recours aux ordonnances. De plus, pour ceux des assurés nés entre 1975 et 2004
qui relèveront de deux systèmes de retraite ou, a minima, de deux régimes
différents, le calcul des droits sera extrêmement compliqué, et cela pourra
engendrer des erreurs de l’administration impossibles à détecter.
On
observe combien le projet de loi suscite des inquiétudes, compte tenu de ses
lacunes – le Conseil d’État l’a souligné. Dans ces conditions, il est
important que l’article 1er, qui fixe des objectifs, garantisse
ces droits essentiels à l’information et au recours.
M. le
président. La parole est à M. Fabien Roussel, pour soutenir le
sous-amendement no 42024.
M. Fabien
Roussel. Ce sous-amendement de précision vise à renforcer l’amendement
de nos collègues socialistes, que nous soutenons. Étant donnée la place laissée
aux ordonnances dans la réforme, nous estimons qu’il faut graver dans le marbre
la nécessité d’informer les bénéficiaires ; nous trouvons donc judicieux
d’insérer cet alinéa dans l’article 1er.
M. le
président. Puis-je considérer, monsieur Roussel, que les trois
sous-amendements de précision suivants, nos 42025 de
M. Pierre Dharréville, 42026 de M. Sébastien Jumel et 42027 de
M. Pierre Dharréville ont été défendus ?
M. Fabien
Roussel. Oui, monsieur le président, de même que les autres
sous-amendements déposés par le groupe la Gauche démocrate et républicaine sur
cet amendement.
M. le
président. La parole est à Mme Caroline Fiat, pour soutenir le
sous-amendement no 42472.
Mme
Caroline Fiat. Je profite de l’occasion offerte par l’amendement de nos
collègues socialistes sur le droit à l’information pour essayer d’obtenir, avant
la fin de nos travaux, un droit à l’information concernant ma question. Notez
que je respecte le thème de l’amendement. Monsieur le secrétaire d’État, ce
serait fort sympathique de votre part d’apporter une réponse à la question que
j’ai posée tout à l’heure ; en effet, demain sera la journée de la
Meurthe-et-Moselle au salon de l’agriculture et je serai donc absente, à la
grande déception de tout le monde, je le sais… (Sourires et
exclamations.)
M. le
président. Les sous-amendements nos 42028 de
M. Pierre Dharréville et 42029 de M. Sébastien Jumel sont
défendus.
La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour soutenir le
sous-amendement no 42360.
M.
Jean-Pierre Door. Le droit à l’information en matière de pensions est
absolument nécessaire ; nous soutenons donc l’amendement de
Mme Biémouret. Nous souhaitons y ajouter la simulation, tout aussi
indispensable : il faut que la population ait accès à un
simulateur.
M. le
président. Le sous-amendement no 42031 de M. Pierre
Dharréville est défendu.
La parole est à Mme Caroline Fiat, pour
soutenir le sous-amendement no 42471.
Mme
Caroline Fiat. Il est défendu, à condition que M. le ministre
entende nous répondre.
M. le
président. Quel est l’avis de la commission sur cette série
d’amendements identiques et sur les sous-amendements ?
M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Vos demandes seront satisfaites par
l’article 12 : avis défavorable.
M. le
président. La parole est à Mme Clémentine Autain.
Mme
Clémentine Autain. Je regrette que le rapporteur et le secrétaire d’État
ne nous aient pas répondu.
M. Bruno
Millienne. Si, une réponse a été donnée !
Mme
Clémentine Autain. Nous aurions pu insister sur un point : qui
délivrera les informations et selon quelles modalités. Quand on considère le
degré de fausseté de l’étude d’impact, on peut s’en inquiéter. (Protestations
sur les bancs du groupe LaREM.)
M.
Jean-Pierre Cubertafon. Vous êtes pénibles !
Mme
Clémentine Autain. Le droit à l’information n’est donc pas un sujet
anodin et je regrette qu’aucun élément ne soit venu du rapporteur ou du
secrétaire d’État, en particulier pour Mme Fiat, qui n’obtiendra pas
satisfaction, ce qui est assez triste. (Sourires.)
M. Bruno
Millienne. Nous y reviendrons après-demain !
M. le
président. La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Thibault
Bazin. Nous allons bientôt arrêter nos débats et je ne voudrais pas que
nous allions nous coucher dans l’inquiétude. (Sourires.) Certaines
lacunes de l’étude d’impact sont préoccupantes, notamment les cas de femmes avec
des enfants. Je suppose, monsieur le ministre, que vous avez été très occupé
depuis votre arrivée, il y a huit jours, à cause du coronavirus, mais
pourriez-vous prendre l’engagement de délivrer les simulations concernées avant
une date précise,…
M. Hervé
Saulignac. En 2030 !
M. Thibault
Bazin. …ainsi que les réponses aux questions qui s’accumulent depuis une
semaine ? Quelles seront les conséquences sur les mères de trois enfants,
en comparaison avec les effets du cumul actuel de la majoration de 10 % du
montant de la pension et de la majoration des trimestres
cotisés ?
Il faut arrêter de comparer des femmes dont les situations
sont complètement différentes, en particulier depuis la création, en 1972, de la
MDA, la majoration de durée d’assurance pour enfants : la génération
actuellement à la retraite ne peut pas être comparée à celle qui va y arriver.
La double majoration aura des conséquences importantes, notamment pour permettre
une liquidation des droits sans décote. Il faut compléter l’étude d’impact avec
sérieux, et j’attends avec impatience les conclusions de la commission
d’enquête.
(Les sous-amendements nos 42024, 42025,
42026, 42027, 42472, 42028, 42029, 42360, 42031 et 42471,
successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 23854 n’est pas
adopté.)
M.
Dominique Potier. Avant les mises aux voix, j’avais demandé deux fois la
parole pour répondre au rapporteur et au ministre ! C’est incroyable,
monsieur le président !
M. le
président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine
séance.
2
Ordre du jour de la prochaine séance
M. le
président. Prochaine séance, demain, à neuf heures :
Suite
de la discussion du projet de loi instituant un système universel de
retraite.
La séance est levée.
(La séance est levée, le lundi 24 février 2020,
à zéro heure.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de
l’Assemblée nationale
Serge Ezdra
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