Système universel de retraite
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AN 1 - Débats 27 février 2020 : 1ère séance du 26
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Après l’article 2

M. le président. Sur les amendements identiques nos 42467 et 42475, qui font l’objet de deux sous-amendements, nos 42569 et 42630, je suis saisi par le groupe La République en marche d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. le secrétaire d’État, pour soutenir l’amendement no 42467.

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Il a été déposé par le Gouvernement, et j’espère qu’il réunira un grand nombre de députés, si ce n’est tous. Les avocats disposent d’un régime de retraite de base qui assure une solidarité entre les hauts et les bas revenus. Dès le mois de juillet, je le répète, le rapport Delevoye mentionnait la possibilité qu’ils conservent un mécanisme de soutien interne, et nous l’avons confirmé lors de nombreuses réunions organisées avec leurs représentants par Mme la garde des sceaux, par M. le Premier ministre et par moi-même.

Il nous appartient donc de préciser devant la représentation nationale le dispositif que nous proposons : il s’agit de confier à la Caisse nationale des barreaux français la gestion d’un mécanisme de solidarité prenant en charge tout ou partie de la hausse résiduelle de cotisation pour les avocats ayant des revenus bas ou médians. En effet, nous avons constaté à deux reprises que ces tranches de revenus étaient susceptibles d’être concernées par un reliquat de hausse de charges. Cette solidarité sera notamment financée par les droits de plaidoirie et leur contribution équivalente, lesquels resteront donc affectés à la Caisse nationale des barreaux français, conformément à une demande forte de leurs représentants.

Grâce à ce financement, la CNBF pourra prendre en charge un pourcentage de la cotisation des avocats, dans la limite d’un plafond qu’il reviendra à la profession d’ajuster, afin précisément de cibler les bas et moyens revenus. Selon des modalités déterminées par la Caisse nationale des barreaux français, ces dispositions seront appliquées à compter de 2029, tant pour les assurés concernés par le système universel – ceux nés après 1975 – que pour les autres.

Le calibrage de ce dispositif de solidarité restera intégralement à la main de la profession. Lui affecter un montant du droit de plaidoirie ou une contribution équivalente identique à aujourd’hui permettrait de limiter significativement les hausses de cotisation, notamment pour les bas et les moyens revenus ; la hausse résiduelle pourrait être inférieure à 2,5 % pour le revenu médian, qui se situe autour de 40 000 euros.

Le Gouvernement a voulu trouver, avec l’ensemble de leurs représentants, des solutions capables de sécuriser tous les avocats, en leur assurant qu’ils ont toute leur place dans le système universel tout en leur donnant les moyens de faire vivre un dispositif de solidarité interne, par l’affectation de la taxe de plaidoirie, le Gouvernement leur ayant manifesté sa volonté de leur faire confiance par l’intermédiaire de leur caisse.

Je vous invite donc à voter massivement pour cet amendement, qui permettra, je crois, de trouver une issue heureuse à l’ensemble des discussions que nous avons eues avec les représentants des avocats. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. le président. La parole est à M. Dimitri Houbron, pour soutenir l’amendement no 42475.

M. Dimitri Houbron. Au-delà de cet amendement, je suis surpris : en 2017, la droite voulait un régime de retraite unique, et elle défend aujourd’hui des régimes autonomes ; une fraction de la gauche souhaitait absorber une partie des caisses autonomes pour financer notamment les retraites à 60 ans, et les mêmes se font aujourd’hui les plus grands défenseurs des régimes autonomes. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. Jean-René Cazeneuve. Très bien !

M. Dimitri Houbron. Nous ne partageons pas leur lecture du monde : nous nous plaçons au-delà des corporatismes, pour défendre l’universalité et la solidarité.

Un dialogue a eu lieu entre le Gouvernement et les représentants des avocats. Les amendements identiques présentés par la majorité et le Gouvernement témoignent de cette ouverture au débat. Cependant, compte tenu du refus complet d’une des parties d’intégrer le régime universel, il n’est pas étonnant que le débat ait tourné court.

Notre ambition est de répondre à leur inquiétude. C’est la raison pour laquelle ces amendements visent à servir cet enjeu de solidarité : afin d’apaiser la crainte, notamment, des petits cabinets – que vous avez cités, mes chers collègues –, nous leur offrons un outil supplémentaire pour la faire œuvrer, impliquant les cabinets, des plus gros jusqu’aux plus petits.

En outre, la réforme s’appliquera aux avocats à partir de 2029, ce qui correspond au seuil défini par le CNBF, à partir duquel la démographie aurait pénalisé le régime autonome. Nous nous conformons donc à l’évolution démographique, en proposant une solution qui comprend une augmentation des cotisations semblable à ce que de toute manière le régime autonome aurait prévu.

Pour terminer, je dirais que le vrai sujet n’est pas la retraite des avocats, mais les moyens pour que la profession vive mieux de son travail. Nous constatons que, pour certaines catégories de contentieux en droit de la famille et en droit pénal, ils sont beaucoup trop nombreux et ne peuvent donc pas vivre de leur travail : certains ne gagnent même pas le SMIC – c’est au moins le cas au barreau de Lille, dans mon territoire.

Notre rôle est de réfléchir à l’évolution de cette profession, pour déterminer comment rémunérer mieux nos avocats, notamment par l’aide juridictionnelle. Je tiens ici à saluer le travail de M. Philippe Gosselin et de Mme Naïma Moutchou, qui ont rédigé un rapport de très grande qualité sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Il faudra aboutir à une réforme structurelle de l’aide juridictionnelle. La garde des sceaux y est ouverte, et je vous invite à travailler avec nous. (Mêmes mouvements.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir le sous-amendement no 42569.

M. Pierre Dharréville. Hier, le 25 février, le Conseil national des barreaux publiait un communiqué de presse : « Cet amendement, que le Gouvernement n’a pas jugé bon de soumettre ou de transmettre au CNB avant son dépôt, reste sur le même principe : faire supporter aux avocats le prix de leur entrée imposée dans le système universel de retraites. […] Nous refusons de payer pour une réforme qu’on nous impose et dont nous ne cessons de dénoncer l’injustice et le danger qu’elle crée pour l’avenir de nos cabinets et de l’accès au droit. » Cet amendement que vous proposez pour solde de tout compte, si je comprends bien, monsieur le secrétaire d’État, est ainsi décrit : « Ces expédients de dernière minute ne sont pas à la hauteur de l’enjeu ni de notre mobilisation. […] La réforme des retraites nécessite un débat parlementaire approfondi. La démocratie justifie qu’il ne soit pas escamoté. Nous y prenons toute notre part. Les légitimes revendications des avocats n’étant toujours pas prises en compte, notre mouvement s’organise pour durer. »

Voilà ce que vous répondent les avocats, qui manifestaient encore, il y a quelques instants, devant l’Assemblée nationale. Ils affirment que cet amendement montre l’improvisation qui règne actuellement.

J’en profite pour renouer avec le fil de mon précédent propos, sur cette réforme « colin-maillard » : nous ne savons pas où nous allons, c’est un bricolage complet, comme on le voit avec cet amendement du Gouvernement. Vous donnez l’impression de découvrir le fonctionnement du système ; vous donnez le sentiment, sans doute à raison, d’une opération de falsification du système visant à le dénigrer, pour justifier votre réforme.

Mme Danielle Brulebois. Le Gouvernement écoute les avocats !

M. Pierre Dharréville. Au bout d’un moment, l’ensemble devient illisible : à force de dérogations diverses et variées, qui d’ailleurs ne répondent pas aux exigences, nous le voyons bien, vous ne maîtrisez plus le concept clé de votre réforme, l’universalité, qui disparaît au passage. Vous ne maîtrisez plus votre créature – votre créature, c’est Pinocchio. (Commentaires sur divers bancs.)

M. le président. La parole est à M. Adrien Quatennens, pour soutenir le sous-amendement no 42630.

M. Adrien Quatennens. La profession d’avocat recouvre des réalités matérielles très diverses, cela a déjà été dit. Pourtant, quelles qu’elles soient, tous les avocats sont opposés à votre réforme des retraites et en demandent le retrait.

Nous devons régulièrement interpréter vos intentions. Avec cet amendement, vous maintenez la Caisse nationale des barreaux français tout en confirmant que vous la videz de ses compétences et que vous l’appauvrissez.

Tout à l’heure, une délégation d’avocats a été reçue à l’Assemblée – ils regrettaient d’ailleurs qu’aucun membre d’un groupe majoritaire n’ait daigné venir. Cet amendement a-t-il été rédigé en discussion avec la CNBF ? A priori, non. Il confirme, comme nombre de nos interventions l’ont montré, que les avocats devront se payer eux-mêmes leur entrée dans ce système, qu’ils n’ont pas souhaité et qu’à cette heure ils refusent.

Ils ne veulent pas s’arranger avec vous : ils veulent le retrait du texte, en écho au mot d’ordre du groupe La France insoumise ; le retrait demeure l’issue la plus sérieuse et la plus raisonnable, étant donné l’impasse dans laquelle vous vous êtes embourbés.

Mme Danièle Obono. Tout à fait !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques et les sous-amendements ?

M. Guillaume Gouffier-Cha, rapporteur général. Sans surprise, il est défavorable aux deux sous-amendements, qui visent à substituer aux mots « chaque année » les mots « tous les ans ».

M. Pierre Dharréville. Alors nous n’allons pas pouvoir voter pour les amendements !

M. Guillaume Gouffier-Cha, rapporteur général. Bien entendu, vous êtes libre de votre vote.

Les amendements identiques n’ayant pas été étudiés par la commission, je m’exprimerai à titre personnel : j’émets un avis favorable car les dispositions qu’ils prévoient permettront concrètement à la CNBF de financer les mesures de solidarité dont une partie de la profession d’avocat a besoin.

M. Guillaume Larrivé. C’est un avis personnel, pas l’avis de la commission !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Je voudrais expliquer posément la façon dont le Gouvernement organise les échanges et les concertations. Si je me permets de venir devant la représentation nationale en affirmant que nous défendons cet amendement après avoir écouté les représentants des avocats, c’est bien parce que nous l’avons fait, à plusieurs reprises – j’étais personnellement associé aux rencontres. Je ne viendrais pas devant vous présenter un amendement, en disant explicitement avoir entendu certaines demandes des représentants des avocats, sans avoir été moi-même présent.

Que toutes les demandes des avocats n’aient pas été acceptées par le Gouvernement était inévitable puisqu’il demande à la représentation nationale de voter un projet de loi établissant un système universel de retraite dans lequel toutes les professions libérales et tous les Français ont leur place, quel que soit leur statut, leur métier et leur histoire.

Pour autant, le Gouvernement pense que les concertations devaient aboutir dès lors que certaines attentes ont été entendues, notamment que la caisse autonome des avocats continue à exister et à disposer de ressources, et puisse décider à ce titre d’affecter à la péréquation entre les plus hauts et les plus bas revenus de la profession la recette des droits de plaidoirie et de la contribution équivalente.

Enfin, je confirme bien sûr que la garde des sceaux a transmis aux intéressés ce projet d’amendement le 21 février, avant son dépôt sur le bureau de votre assemblée.

J’entends que vous puissiez ne pas être d’accord avec la mesure proposée mais j’en suis tout de même très surpris, après les heures de débats que nous avons consacrées au sujet : que l’on ne prétende pas qu’il n’y a eu aucune concertation et aucune écoute. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.)

M. le président. La parole est à M. Éric Woerth.

M. Éric Woerth. Rien n’est clair dans cette opération de colmatage. Pardon de vous fâcher, monsieur le secrétaire d’État, mais il nous semble que les avocats n’ont pas été vraiment consultés. En tout cas, c’est ce qu’ils nous disent. S’agissant des avocats, un sujet très important puisqu’il est évoqué depuis déjà plusieurs semaines dans nos débats, il aurait été bien que Mme la garde des sceaux soit présente parmi nous pour nous dire exactement de quoi il retourne.

Mme Valérie Lacroute. Ah ça oui !

M. Éric Woerth. En tout cas, on a l’impression que les avocats vont être les propres financeurs du coût de leur adhésion au régime universel.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est ça !

M. Éric Woerth. Ils le seront d’abord à travers les fonds de réserves de leur caisse, dont ils vont conserver la propriété mais qui devront servir à financer la transition et leur intégration dans le régime d’universalité, mais aussi à travers les droits de plaidoirie, une vieille taxe déjà affectée d’ailleurs à ladite caisse et au financement de leur régime de retraite et de leur régime d’invalidité. On peut certes se dire que vous consolidez le dispositif existant en lui donnant valeur législative alors qu’il n’existait que par décret, mais on ne voit pas bien à quoi cela sert. Il s’agit tout de même de fonds qui étaient complètement inclus dans leur régime autonome et que les avocats n’auront plus que la permission d’utiliser pour financer leur propre solidarité – du moins ce que l’État n’aura pas redistribué via le Fonds de solidarité vieillesse universel. C’est d’ailleurs une conception assez curieuse de l’universalité puisque vous faites ainsi exactement le contraire.

Pour ma part, je me demande à quoi sert tout cela. Pourquoi le Gouvernement s’est-il braqué contre à une profession entière ? Pourquoi cette universalité au fond mal comprise ? Les régimes autonomes auraient dû le rester et ne participer au régime universel que sur un certain plan, continuant à prospérer par ailleurs de leur côté. Chacun y aurait trouvé un avantage : plus d’universalité et plus de solidarité générale, mais tout en prenant en compte des particularités des uns et des autres, sachant que le régime des avocats est en excédent et qu’il fonctionne bien. Et puis, si un jour il venait à moins bien fonctionner, si un jour le grand régime universel les attirait, ils auraient pu y accéder de manière volontaire – en payant évidemment une soulte. Cela aurait été beaucoup moins brutal, beaucoup moins idéologique et beaucoup plus moderne. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Monsieur le secrétaire d’État, vous dites avoir entendu les demandes des avocats en proposant cet amendement, qui vise finalement à donner une nouvelle mission à la CNBF, permettant son maintien mais tout en lui retirant ses missions actuelles et en basculant les avocats dans le système universel.

Concrètement, il prévoit ainsi que leur caisse pourra compenser aux avocats gagnant moins de 80 000 euros par an le coût de l’augmentation des cotisations de retraite, dont le taux augmentera de 5,4 points entre 2029 et 2040 – je pense que personne ici ne le conteste. Ce dispositif de solidarité interne serait financé par la réaffectation du produit des droits de plaidoirie – qui représente environ 8 millions d’euros – et de la contribution équivalente aux droits de plaidoirie – versée par les avocats dont ce n’est pas l’activité principale –, dont le produit est stable à environ 87 millions d’euros. Cet amendement, qui ne repose sur aucune étude d’impact faisant état du nombre d’avocats potentiellement concernés par le seuil de 80 000 euros, est censé permettre de couvrir le montant de la hausse des cotisations futures. Je doute tout de même beaucoup qu’en l’absence d’éléments précis, vous puissiez affirmer, au regard de ce que je viens d’indiquer, que le dispositif sera financé.

M. Jérôme Lambert. C’est le brouillard !

Mme Marie-Noëlle Battistel. Cette mesure a été, nous avez-vous dit, préparée en concertation avec la profession, mais je ne comprends pas alors pourquoi les avocats étaient encore mobilisés cet après-midi devant l’Assemblée :…

M. Guillaume Gouffier-Cha, rapporteur général. Ce n’est pas un syndicat qui manifeste.

Mme Marie-Noëlle Battistel. …soit ils n’ont pas été entendus et ne sont pas d’accord avec votre proposition, soit ils n’ont pas saisi qu’elle était la bonne. Je penche plutôt pour la seconde hypothèse, d’ailleurs aujourd’hui la plus aisément vérifiable. En tout cas, la mobilisation actuelle des avocats, c’est du jamais vu, et votre proposition n’est pas du tout à la hauteur de leurs attentes. Le groupe Socialistes et apparentés ne votera donc pas pour l’amendement du Gouvernement. (Mme Emmanuelle Anthoine et M. Jérôme Lambert applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Adrien Quatennens.

M. Adrien Quatennens. Le groupe La France insoumise ne votera pas cet amendement du Gouvernement parce qu’il confirme ce que nous pensons du dispositif proposé. À vous entendre, monsieur le secrétaire d’État, soit les avocats nous mentent alors qu’ils sont au fond d’accord avec vous, soit ils n’ont plus aucune raison d’être encore mobilisés… Mais ils le sont pourtant plus que jamais et toujours très déterminés, vous l’avez vu.

De plus, il est quelque peu contradictoire de la part du Gouvernement de nous reprocher sans cesse de défendre des amendements rédactionnels en proposant de remplacer un mot par un autre, quand sa méthode est de déposer les siens à la dernière minute. En l’occurrence, ce sous-amendement rédactionnel nous permet d’intervenir sur un amendement déposé vendredi dernier, hors des délais possibles pour les nôtres.

L’amendement du Gouvernement confirme, disais-je, ce que nous pensons car il éclaire son intention : les avocats auront donc bien à payer à leurs frais leur entrée dans un système dont ils ne veulent pas et qu’ils combattent encore et toujours. (Mme Danièle Obono applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne. C’est en effet du bricolage, du rafistolage, du colmatage, sans rapport avec la demande des avocats que nous avons rencontrés. Le groupe GDR vous demande, une fois de plus, d’écouter les avocats : ils étaient encore à l’Assemblée cet après-midi et nous les soutenons, nous ne les trahirons pas, nous ne nous associerons pas à cette manœuvre de diversion qui va, en plus, enchérir le fonctionnement de la justice ! (Mme Marie-Noëlle Battistel applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Mignola.

M. Patrick Mignola. Les avocats de notre pays sont très mobilisés depuis quelques semaines.

M. Patrick Mignola. Leur première opposition à la réforme, tout à fait compréhensible, résultait de la crainte légitime que soient atteintes les réserves qu’ils avaient constituées. C’est la raison pour laquelle le groupe que j’ai l’honneur de présider avait posé comme préalable à la réforme que les réserves, quelles que soient les professions concernées, demeurent évidemment à la main de ceux qui les avaient constituées, et il est important de le réaffirmer.

M. Patrick Mignola. Leur second motif d’opposition, tout autant compréhensible, était dû à la crainte que l’entrée dans le régime universel ne produise une augmentation des cotisations. Se posait donc à nous toute la question des transitions pour ces professions et de leurs conditions d’entrée dans le nouveau système.

M. Patrick Mignola. Le Gouvernement a fait plusieurs propositions mais, avant d’y revenir, je tiens à souligner d’abord l’esprit de la responsabilité des avocats – un désaccord ne doit pas empêcher de reconnaître l’esprit de responsabilité de son interlocuteur. Ainsi, il y a quelques années déjà, en 2013, les avocats avaient pris conscience qu’ils faisaient face à un problème démographique appeler à durer puisqu’un plus grand nombre de pensionnés serait plus difficilement finançable si le nombre de cotisants devenait proportionnellement moindre et, de surcroît, si le niveau de rémunération de ceux-ci baissait.

M. Jérôme Lambert. Ils ont anticipé !

M. Patrick Mignola. Ils avaient donc pris leurs responsabilités en augmentant d’ores et déjà leurs propres cotisations dans le cadre du régime autonome.

M. Jérôme Lambert. Exactement !

M. Patrick Mignola. Grâce à l’esprit de responsabilité dont ils ont fait preuve, l’augmentation prévue n’interviendra qu’à partir de 2019 (Exclamations sur les bancs du groupe LR), ce qui ne représentera, après l’amendement que le Gouvernement vient de nous présenter, qu’un montant de 10 à 15 euros par mois. Certes, 10 à 15 euros mensuels ne sont pas rien quand on est avocat en début de carrière ou dans un petit cabinet, parce que, contrairement à la rumeur publique, les avocats ne sont plus des notables hyper bien payés. Les raisons en sont assez simples : la France contribue à son institution judiciaire à hauteur de 72 euros par habitant et par an, contre 145 euros en Allemagne et 155 euros en Grande-Bretagne – ainsi, même dans les pays réputés plus libéraux que le nôtre, la participation financière de la collectivité à l’institution judiciaire est bien supérieure.

J’ai entendu un collègue de La République en marche dire très légitimement tout à l’heure qu’il fallait nous pencher sur le devenir de la profession d’avocat. Le nouveau système de retraite, me semble-t-il, doit être l’occasion non seulement d’accompagner les avocats en début de carrière et les petits cabinets pour qu’ils puissent supporter l’entrée en 2029 dans le nouveau régime qui consolidera leurs retraites à long terme, mais aussi de donner obligation à cette majorité, la première depuis dix ans à avoir augmenté le budget de la justice, de continuer à réparer ce budget afin que notre pays ait une institution judiciaire à la hauteur de ce que la République mérite. (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.)

(Les sous-amendements identiques nos 42569 et 42630 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 42467 et 42475.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

        Nombre de votants                        126

        Nombre de suffrages exprimés                125

        Majorité absolue                        63

                Pour l’adoption                95

                Contre                30

(Les amendements identiques nos 42467 et 42475 sont adoptés.)

(Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.)

 

 
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