Système universel de retraite Art. 2 - Version analytique |
AN 1 - Débats 26 février 2020 : 1ère séance du 25 |
Article 2 (suite)M. le président. La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l’amendement no 24927. Mme Valérie
Rabault. Au fil des débats que nous menons depuis une semaine, on se
rend compte que si certaines professions – marins, danseurs d’opéra… –
bénéficient d’un régime de retraite spécifique, c’est parce qu’au cours des
quarante ou cinquante dernières années, les spécificités de leur métier ont été
reconnues. Il n’y a pas lieu de parler de régime spécial. M. le président. La parole est à M. Nicolas Turquois, rapporteur de la commission spéciale, pour donner l’avis de la commission. M. Nicolas
Turquois, rapporteur de la commission spéciale. Avant de donner
mon avis sur l’amendement, je tiens à exprimer mon soutien à mon collègue
Jacques Maire, que j’ai apprécié en tant que corapporteur. C’est la première
fois que je travaillais avec lui et je veux souligner sa grande humanité et son
grand professionnalisme. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM. –
M. Vincent Bru applaudit également.) M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des retraites, pour donner l’avis du Gouvernement. M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État chargé des retraites. Nous avons évoqué ce sujet à plusieurs reprises. Je confirme que la reconnaissance des spécificités, que nous avons évoquée hier soir lors de nos échanges avec M. Le Fur, est toujours d’actualité, mais que celles-ci seront prises en considération à l’intérieur du système universel de retraite. Avis défavorable. M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur. M. Marc Le
Fur. L’amendement que vient de défendre Mme Rabault permet de
poursuivre nos échanges sur les gens de mer. À métier spécifique, retraite
spécifique ! En effet, les deux sont liés. M. le président. La parole est à Mme Catherine Fabre. Mme Catherine Fabre. Chers collègues, j’ai du mal à vous suivre quand je vois cet amendement et d’autres qui suivront, notamment concernant l’Opéra de Paris ! Nous venons de terminer l’article 1er, sur lequel vous avez déposé de nombreux amendements dénonçant le fait que nous ne créions pas un régime réellement universel. Vous vouliez aller beaucoup plus loin dans l’universalité ; puristes, vous nous expliquiez que dès lors que nous reconnaissions certaines spécificités, notamment celles des marins – que nous voulons intégrer au régime universel, mais en tenant compte des particularités de ce métier –, le système à venir n’était pas universel. (« Pas nous ! » sur les bancs du groupe GDR.) Et vous voulez maintenant exclure certaines professions – marins, danseurs de l’Opéra de Paris, etc. – du champ d’application de ce système ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) M. Jean-René Cazeneuve. Excellent ! M. Marc Le Fur. Vous en avez bien exclu la Banque de France, alors il faut aussi vous occuper des marins ! Mme Catherine Fabre. Finalement, vous voulez maintenir l’existant – quarante-deux régimes autonomes ou spéciaux –, sans rien changer. C’est d’autant plus étonnant que s’agissant par exemple de l’Opéra de Paris – la question sera examinée un peu plus tard, nous le savons pour l’avoir déjà traitée en commission –, la proposition de régime spécial ne concerne que les danseurs de cet établissement et non l’ensemble des danseurs français, dont le métier présente les mêmes spécificités. M. Marc Le Fur. On est en train de parler de marins ! Mme Catherine Fabre. Je ne comprends pas cette position, que je trouve très conservatrice et pas du tout réformiste. Cet amendement nous donne l’occasion de réaffirmer notre volonté d’aller plus loin dans l’universalité et de faire en sorte que l’ensemble des professions dont la spécificité est reconnue intègrent malgré tout le régime universel. (Mêmes mouvements.) M. le président. La parole est à M. Pierre Dharréville. M. Pierre
Dharréville. Madame Fabre, nous contestons en effet que le système que
vous créez soit universel. Nous pensons de plus qu’il abaisse les droits. En
l’occurrence, nous craignons que ce soit le cas pour les marins. M. le président. La parole est à M. Adrien Quatennens. M. Adrien
Quatennens. Nous débattons maintenant depuis plusieurs jours et la
majorité exprime souvent le souhait de nous voir avancer. Comme vous, nous
sommes soucieux de progresser dans l’examen du texte ; d’ailleurs, nous
avons beaucoup progressé puisque toute une série de faits sont maintenant
vérifiés. Ainsi, nous savons désormais que la valeur du point n’offre aucune
garantie quant au niveau des pensions ; que les femmes, qu’on présentait
comme les grandes gagnantes de la réforme, ne le sont pas ; que les
agriculteurs, qui devaient se voir octroyer une pension de retraite de
1 000 euros, ne seront finalement que 40 % à en
bénéficier. Mme Catherine Fabre. Si ! M. Adrien Quatennens. Non, les statistiques du ministère du travail – une instance sérieuse – n’en reconnaissent que vingt-trois,… M. Erwan Balanant. Hier, c’était dix ! M. Adrien
Quatennens. …et le Conseil d’orientation des retraites, dix-huit.
Quarante-deux, c’est le résultat d’une espèce de combinaison confuse qui vise à
introduire dans les esprits l’idée qu’il y en aurait trop. M. le président. La parole est à Mme Michèle de Vaucouleurs. Mme Michèle de Vaucouleurs. Ma circonscription ne compte pas de marins, donc tout en écoutant la discussion, je suis allée voir ce qu’il en était de leur régime et je lis qu’en matière de réforme des retraites, les marins ont déjà obtenu des garanties. C’est Ouest-France qui le dit, le 19 décembre 2019, en précisant que les spécificités de leur régime seront conservées et intégrées dans le régime général. M. Marc Le Fur. C’est un excellent journal, mais ce n’est pas le Journal officiel ! Mme Michèle de Vaucouleurs. S’agissant de votre demande, monsieur Le Fur, « l’harmonisation des cotisations sur un taux unique universel – 28,12 %, dont 11,25 % de part salariale et 16,87 % de part patronale – se fera sur un temps long – quinze à vingt ans – pour la part patronale, afin d’éviter une hausse brutale des cotisations ». M. Marc Le Fur. C’est Ouest-France aussi ? Mme Michèle de Vaucouleurs. « Elle se fera sur un temps court pour la part salariale, vu la proximité des taux actuels – 10,85 % – et futurs […]. » Ainsi, des garanties ont déjà été données aux marins il y a un mois et demi. Tout n’est pas encore réglé, mais on est en bonne voie de négociation avec la profession. M. Pierre Dharréville. C’est dans la loi qu’il faut inscrire les garanties ! M. le président. La parole est à M. Paul Christophe. M. Paul
Christophe. Après dix jours de commission spéciale et huit jours
d’examen en séance, on en est encore parfois à ressasser les vieilles rengaines.
En effet, mon cher collègue, le titre de la loi évoque un système – et non
un régime – universel de retraite. Cela tombe bien car le Conseil d’État a
justement précisé que ce n’était pas un régime, mais un système universel que
nous souhaitions instaurer. On peut lui faire confiance !
(M. Erwan Balanant applaudit.) M. Thibault Bazin. Allez, avançons ! M. Paul
Christophe. Étant élu d’une circonscription côtière et né dans un autre
département marin, je suis aussi très attentif à ce sujet. Il est clair qu’une
attention particulière y a été portée lors des concertations et négociations.
Rappelons que l’Établissement national des invalides de la marine
– ENIM –, chargé du régime spécial de sécurité sociale des marins, est
très déficitaire. La solidarité nationale lui vient en aide pour combler ce
déficit patent. M. le président. La parole est à Mme Valérie Rabault. Mme Valérie Rabault. Bien que n’ayant pas de marins dans ma circonscription, je souhaitais réagir pour faire observer que si l’ENIM a été créé avant les retraites, sous Louis XIV, c’est bien parce qu’il y avait des spécificités à prendre en considération. Peut-être souhaitez-vous faire table rase d’un régime qui existe depuis plus de 400 ans, mes chers collègues, mais s’il a été construit, c’est bien parce que ces spécificités ont un sens pour la vie des marins. M. Marc Le Fur. Tout à fait ! Mme Valérie Rabault. Vous nous citez un article de Ouest France pour nous rassurer. J’ai du respect pour ce quotidien, mais c’est ici qu’est faite la loi, et ses articles sur le sujet sont susceptibles d’évoluer au gré des mesures que nous allons adopter. Ce qui compte, ma chère collègue, c’est ce que nous votons. Mme Michèle de Vaucouleurs. Des garanties ont été données ! Mme Valérie Rabault. Vous voulez faire entrer les marins dans votre système universel composé de régimes spécifiques – je reprends vos propos, mon cher collègue, que j’ai bien écoutés. Il n’empêche que, à ce stade du débat, nous n’avons pas de garantie. Mme Michèle de Vaucouleurs. Pour vous, rien ne constitue une garantie ! Mme Valérie Rabault. Avec tout le respect que j’ai pour Ouest France, son article ne constitue pas une garantie au regard de la loi. (L’amendement no 24927 n’est pas adopté.) M. le
président. Je suis saisi de deux amendements identiques,
nos 11686 et 11687. M. Fabrice
Brun. Nous souhaitons supprimer le mot « universel » à
l’article 2, comme il conviendrait d’ailleurs de le faire dans tout le
texte. Vous me répondrez que nous avons déjà eu ce débat, et nous pouvons en
convenir. M. le président. Merci, monsieur Brun. M. Fabrice Brun. Pour conclure, monsieur le président, je dirai que tout le monde a le droit d’être défendu, et ce, en tout point du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 11687. M. Marc Le Fur. M. Brun a parfaitement exprimé les choses. M. le président. Quel est l’avis de la commission ? M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Les amendements concernés demandent la
suppression du mot « universel » et j’y suis défavorable. Comme vous
l’avez rappelé, cher collègue, nous en avons déjà longuement débattu. M. Fabrice Brun. Alors, il ne faut pas augmenter les cotisations ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Les questions relatives aux avocats seront abordées plus loin,… M. Fabrice Brun. Peut-être ! M. Nicolas
Turquois, rapporteur. …au moment où nous en viendrons à
l’intégration de leur régime dans le système universel. M. Ugo Bernalicis. Ce sont des combinaisons ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. …tantôt sur les seuils de huit ou trois PASS, tantôt sur les conséquences de la réforme pour les femmes ou pour les agriculteurs. M. Ugo Bernalicis. Sans parler des avocats ! Ou des chômeurs ! En fait, cela concerne tout le pays ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Vous tournez en boucle sur ces thèmes. Essayez de travailler sur le fond, ça changera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM.) M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ? M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Monsieur le député Brun, je comprends que le sujet des avocats puisse vous tenir à cœur mais il me semblait que nous l’avions déjà traité hier soir en étant à peu près exhaustifs. Nous avons des différences d’appréciation, ce que je peux comprendre aussi, mais il est explicitement prévu dans le projet de loi – je vous ai donné les références, par exemple l’alinéa 22 de l’article 50 – que les réserves de toutes les caisses autonomes spécifiques ne seraient pas touchées. C’est dans le texte, on ne peut plus en douter. M. Fabrice Brun. Vous dites qu’ils doivent contribuer, participer ! M. Ugo Bernalicis. Et l’amendement que vous avez déposé à ce sujet ? M. Laurent
Pietraszewski, secrétaire d’État. Nous en revenons toujours au
même débat alors que vous souhaitez, il me semble, que nous avancions dans
l’examen du texte. Convenons que nous ne sommes pas d’accord sur le sujet et
qu’il y a encore du travail à faire avec les avocats – qui ont toute leur
place dans le système universel. Réaffirmons que les avocats, comme tous les
membres de professions libérales, resteront propriétaires des réserves qu’ils
ont constituées et qui resteront à leur main – ce qui est très bien comme
cela. Cherchons des solutions, même si j’ai bien compris que le projet du groupe
LR était différent du nôtre – le président Woerth, hier, semble avoir approuvé
le résumé que j’en avais fait. M. Fabrice Brun. Et on n’augmente pas les cotisations ! M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Souffrez que nous ne soyons pas d’accord ! Par ailleurs, il n’arrivera rien de négatif aux avocats, mais – et vous avez raison sur ce point, monsieur Brun – il reste du travail à faire pour alléger les charges de ceux dont les revenus sont relativement modestes – autour de 30 000 euros annuels. M. Fabrice Brun. Merci de le reconnaître, monsieur le secrétaire d’État ! M. Laurent
Pietraszewski, secrétaire d’État. Je le répète, nous réalisons ce
travail avec les représentants des avocats. Nous avons préparé des amendements
sur le sujet, afin notamment de maintenir une péréquation entre les cabinets
d’avocats prospères et ceux qui le sont moins, par exemple ceux qui dépendent de
l’aide juridictionnelle. La représentation nationale aura donc l’occasion de
s’exprimer sur le sujet. M. Fabrice Brun. Merci ! M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Du reste, la controverse est toujours intéressante parce qu’elle fait avancer le débat. M. Jean-Luc Mélenchon. Ah, vous voyez bien ! M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon. M. Jean-Luc
Mélenchon. Voilà qui est plus aimable, monsieur le secrétaire d’État,
que les propos tout à fait désagréables de M. Turquois ! Pourquoi,
monsieur le rapporteur, voulez-vous dicter à M. Quatennens ce que doivent
être ses arguments ? Dites que vous les rejetez, mais évitez de faire des
commentaires sur leur articulation ou leur caractère répétitif. M. Erwan Balanant. Nous aussi, on vous explique ! M. Jean-Luc
Mélenchon. Vous ne comprenez pas pourquoi nous réclamons des régimes
particuliers, que vous appelez spécifiques, alors que nous reprochons à votre
système de ne pas être universel. Bien sûr ! C’est vous qui avez commencé
en disant : il y a quarante-deux régimes, c’est illisible, donc nous
faisons un régime universel. Nous vous avons dit dès le début que ce n’était pas
possible : les régimes spéciaux ont une longue histoire et répondent à des
nécessités liées aux métiers qu’ils concernent. M. Erwan Balanant. Ce sont des chênes ! M. Jean-Luc Mélenchon. Vous pouvez aller voir cette plantation de sapins (« Des chênes ! » sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM) destinés à la marine nationale : c’est un monument du colbertisme français M. Erwan Balanant. Le bois de sapin ne convient pas à la construction navale ! M. Jean-Luc Mélenchon. Voilà pourquoi nous sommes obligés de vous expliquer que ces régimes, que vous rebaptisez « spécifiques », répondent à des nécessités. Par conséquent, le système n’est pas universel. Il n’y a qu’une chose qui soit universelle : la transformation en points de ce qui était autrefois évalué en trimestres cotisés. Ces points sont votre seule invention, et vous les avez créés pour préparer la capitalisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) M. Adrien Quatennens. C’est de la poudre de perlimpointpoint ! (Sourires.) M. le président. La parole est à M. Jean-René Cazeneuve. M.
Jean-René Cazeneuve. À gauche de notre hémicycle, les députés sont
favorables aux régimes spéciaux, aux régimes autonomes. C’est assez logique,
même si dans le même temps, ils nous reprochent d’en créer de nouveaux alors
que, somme toute, ils devraient être contents ! M. Fabrice Brun. Toutes les professions concernées sont vent debout contre votre réforme ! M. Jean-René Cazeneuve. Nous sommes pour un régime universel parce qu’il est plus protecteur pour l’ensemble des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) M. le président. La parole est à M. Éric Woerth. M. Éric
Woerth. Je ne savais pas que M. Cazeneuve était communiste
– la nouvelle réjouira M. Jumel ! Un régime universel, valant
pour tout le monde quelles que soient les situations, correspond à une vision
très collective des choses. M. Marc Le Fur. Tout à fait ! M. Éric Woerth. Dans ce cadre, nous prônons une fusion entre le secteur privé et le secteur public : nous voulons que les salariés et les fonctionnaires soient traités de la même manière, tout en faisant en sorte que puissent vivre des régimes totalement autonomes, comme celui des avocats. Il y a une logique ! Vous nous reprochez de nous répéter mais nous avons visiblement besoin de le faire puisque cette information n’était pas parvenue jusqu’à vos oreilles. Mme Marie-Christine Dalloz. Vous en redemandez ! M. Ugo Bernalicis. Cela ressemble à de l’obstruction… M. Éric
Woerth. S’agissant des avocats, ce sont les plus modestes qui vont
souffrir du régime que vous voulez leur imposer : leurs cotisations vont
terriblement augmenter. Ces avocats ne croient pas à vos propositions de
compensation au travers de mécanismes du type réduction d’assiette de CSG,
notamment parce que ces mesures sont fragiles et qu’elles peuvent être remises
en cause chaque année. Tout cela crée une instabilité, une insécurité pour ces
professions qui n’en ont franchement pas besoin. M. le président. La parole est à M. Bruno Fuchs. M. Bruno
Fuchs. En ce qui concerne les avocats, la discussion que nous devons
avoir avec eux, dans un climat de confiance, ne doit pas se limiter à la
question des retraites. Cette question, au fond, est d’ailleurs assez
simple : la négociation a beaucoup progressé puisqu’ils ont désormais
l’assurance que leur cotisation n’augmentera pas avant 2029. Compte tenu de
l’abattement de 30 % sur l’assiette de la CSG et de l’augmentation de
2 % des cotisations décidée par la CNBF, la Caisse nationale des barreaux
français, il reste à trouver le moyen de compenser l’augmentation de 5,5 à
6 % prévue pour la période 2029 à 2040. Or il semble possible d’avancer sur
ce point dans le cadre de la négociation. Un accord ne semble plus très
loin. M. Éric Diard. Pourquoi ? M. Bruno Fuchs. Parce que ce n’est pas la réalité ! M. Ugo Bernalicis. Mais si ! Et cela n’est pas seulement dû à la réforme des retraites ! M. Bruno Fuchs. Au contraire, dans le cadre des discussions qu’ils mènent avec le Gouvernement, les avocats ont l’opportunité de définir des conditions plus favorables pour leur profession – c’est d’ailleurs le cas également des agriculteurs et d’autres professions en difficulté. M. Marc Le Fur. Il faut le faire pour les agriculteurs ! Vous ne faites rien pour eux ! M. Bruno
Fuchs. La position de nos collègues du groupe Les Républicains est
facile – ils critiquent –, mais permettez-moi de rappeler que Nicolas
Sarkozy avait demandé, en septembre 2007, au gouvernement de l’époque de mettre
un terme aux régimes spéciaux et que cinq ans plus tard ils étaient toujours là,
malgré des mesures dont le coût a été estimé à 5 milliards d’euros.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les
bancs du groupe LR.) M. Ugo Bernalicis. Laissez donc votre place, nous sommes prêts à la prendre ! M. le président. La parole est à M. Hubert Wulfranc. (M. Bruno Fuchs échange des propos avec M. Éric Diard.) Chers collègues, si vous voulez poursuivre la discussion, faites-le en dehors de l’hémicycle. M. Thibault Bazin. Monsieur le président, défendez Sarkozy : il a fait des choses ! M. le président. Vous avez la parole, monsieur Wulfranc. M. Hubert
Wulfranc. Nous parlons d’universalité, mais que recouvre ce concept en
réalité ? Revenons sur le fond de votre système prétendument
universel. M. le président. Merci, monsieur Wulfranc. M. Hubert Wulfranc. …à laquelle on promet un bel avenir dans notre pays mais qui dont les salariés ne bénéficient pas de pensions de retraite à la hauteur de leurs conditions de travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) (Les amendements identiques nos 11686 et 11687 ne sont pas adoptés.) M. le président. La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l’amendement no 26738 et les quinze amendements identiques déposés par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. M. Pierre
Dharréville. Il s’agit d’amendements pour nous mettre en jambe !
Notre désaccord est clair, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire
d’État : vous jugez votre système universel, nous le jugeons
inéquitable. M. Marc Le Fur. Bonne question ! M. Pierre Dharréville. Si vous me le confirmez, démonstration sera faite que nous avons raison. M. le président. Quel est l’avis de la commission ? M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Les amendements proposent de remplacer le
mot « universel » par le mot « inéquitable ». Je le redis
une fois encore, nous considérons que le système est universel parce qu’il
concerne l’ensemble des Français et parce qu’il définit des règles communes pour
tous, contrairement au système actuel. M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ? M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Monsieur Dharréville, je suis là pour discuter du fond du projet de loi ! Vous avez déposé l’amendement qui vise à remplacer le mot « universel » par le mot « inéquitable » sur tous les alinéas de l’article 1er et le voilà de nouveau sur les alinéas de l’article 2. Mme Mathilde Panot. Conformément à la décision de la conférence des présidents ! M. Pierre Dharréville. Parlez donc du fond ! M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Vous utilisez vos amendements pour jouer à un quiz géant avec une multitude de cas types. M. Fabien Roussel. Pour savoir la vérité, tout simplement ! Répondez à la question ! M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Si j’en crois le président de votre groupe, vous avez la volonté d’aller plus loin dans le texte. Alors faisons-le ! Passons à autre chose, je vous en prie. M. Fabien Roussel. Répondez à la question ! M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. Avis défavorable. M. le président. La parole est à M. Ugo Bernalicis. M. Ugo
Bernalicis. Le système sera peut-être universel, mais il sera aussi
inéquitable, notamment pour les avocats. M. Fabien Roussel. C’est clair ! C’est écrit ! M. Ugo Bernalicis. Pourquoi ne l’assumez-vous pas ? C’est pourtant bien ce qui se dit à la table des négociations quand la garde des sceaux, Nicole Belloubet, reçoit les avocats ! (Protestations sur les bancs du groupe LaREM.) M. Bruno Questel. Ce n’est pas vrai ! M. Ugo
Bernalicis. Mais vous devriez comprendre que c’est précisément ce dont
ils ne veulent pas. C’est bien la raison pour laquelle ils votent la grève
reconductible dans leurs assemblées générales extraordinaires. Mme Fiona Lazaar. Ne soyez pas grossier ! M. Ugo Bernalicis. Les petits cabinets dont nous parlons gèrent l’aide juridictionnelle et interviennent au pénal auprès des plus démunis pour garantir les libertés fondamentales de notre pays, les libertés individuelles. C’est ça que vous allez faire crever en premier ! Pour nous, c’est non ! (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz. Mme
Marie-Christine Dalloz. On nous a reproché de n’avoir rien fait à
l’époque du président Sarkozy. C’est pourtant la majorité de l’époque qui
a mis en œuvre la convergence entre la fonction publique et le secteur privé, et
c’est elle qui a eu le courage d’allonger l’âge de départ à la retraite à
62 ans ! M. Marc Le Fur. Elle ne coûte rien ! Mme
Marie-Christine Dalloz. …mais elle contribue à la solidarité nationale à
hauteur de 90 millions d’euros chaque année. Ce n’est pas, monsieur
Cazeneuve, ce que j’appelle un régime spécial ! Vous devriez sans doute
revoir votre définition. M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne. M.
Jean-Paul Dufrègne. Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le
rapporteur, une fois de plus, lorsque nous abordons les questions de fond, vous
ne répondez pas. Vous n’avez pas répondu à la question de mon collègue Pierre
Dharréville. M. le président. La parole est à M. Sylvain Maillard. M. Sylvain
Maillard. Je ne comprends pas le raisonnement qu’a tenu tout à l’heure
notre collègue Pierre Dharréville. Il a pris l’exemple d’une personne née en
1974 pour démontrer que le système actuel était plus équitable. M. Pierre Dharréville. Un exemple très nouveau ! M. Sylvain Maillard. …et d’un autre, né la même année, travaillant à Tourcoing. Ils ne partiront pas à la retraite au même âge et ne toucheront pas la même pension alors qu’ils ont cotisé le même nombre d’années. M. Fabien Roussel. Vous vous alignez sur lequel ? M. Sylvain
Maillard. Cela, nous le savons. Allons donc plus loin. M. Fabien Roussel. Lequel ? 64 ans, 65 ans ou 66 ans ? M. Sylvain Maillard. Ce nouveau système est donc à la fois équitable et universel, ce que je viens de démontrer. (Mêmes mouvements.) M. Cédric Roussel. C’est l’universalité de la pauvreté ! M. Jean-Luc Mélenchon. Le nivellement par le bas ! M. Ugo Bernalicis. Le ruissellement vers le haut ! M. le président. La parole est à M. Christian Hutin. M.
Christian Hutin. Je tousse un peu, mais je ne voudrais pas que
l’ensemble de l’hémicycle soit confiné… M. Erwan Balanant. Mais non, elles ne vont pas doubler ! M.
Christian Hutin. Sortons de l’hémicycle, sortons de ce confinement,
écoutons-les ! M. le président. La parole est à Mme Nathalie Elimas. Mme Nathalie Elimas. On a entendu sur ces amendements un peu tout et n’importe quoi ; il a encore été question des avocats mais aussi des réserves des caisses – fallait-il ou non les utiliser ?– ; et je suis perdue (Exclamations sur les bancs des groupes LR, SOC, FI et GDR),… M. Christian Hutin. Vous l’êtes depuis le début ! Comme les Français eux-mêmes, d’ailleurs ! Mme Nathalie Elimas. …je n’y comprends plus rien, tant il y a de contradictions entre ce qui se dit ici et ce qui est écrit ailleurs, par exemple dans le contre-projet de La France insoumise. (Mêmes mouvements.) En tout cas, le système universel tel que nous le proposons offre la possibilité de réinventer le dispositif de solidarité en réduisant les écarts de pensions entre les plus fragiles et les plus aisés, entre les femmes et les hommes, et aussi en soutenant les familles et en apaisant la crainte des conséquences du veuvage. M. Marc Le Fur. Faux ! C’est le contraire ! Mme Nathalie Elimas. Je voulais revenir, monsieur Dharréville sur votre intervention d’hier où vous avez parlé de machine infernale. Vous avez raison, elle existe : c’est le système actuel, la machine infernale des injustices, la machine infernale des petites quotités de travail qui n’ouvrent aucun droit, celle des critères de durée d’assurance qui pénalisent bon nombre de nos concitoyens, celle qui ne permet plus la linéarité dans sa profession et donc qui rend l’avenir complètement incertain. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes MODEM et LaREM.) M. Jean-Luc Mélenchon. Tout cela, vous l’avez déjà dit ! Mme Nathalie Elimas. Il faut donc répondre à l’exigence d’équité et garantir la lisibilité des retraites à travers un système universel, destiné à tous et fondé sur des règles communes, compréhensibles par tous. (Mêmes mouvements.) (Les amendements nos 26738 et identiques ne sont pas adoptés.) M. le
président. Je suis saisi d’un amendement no 23428 qui
fait l’objet de plusieurs sous-amendements, nos 42583, 42558 et
42561. Les sous-amendements nos 42558 et 42561 sont
identiques. M. Éric
Diard. Mon amendement n’a pas pour but de critiquer ; il vise à
défendre le caractère autonome des caisses de retraite des professions libérales
– médecins, pharmaciens, les avocats, auxiliaires médicaux. Mes chers collègues,
vous confondez parfois les régimes spéciaux et les régimes autonomes :
nous, Les Républicains, défendons les régimes autonomes. Je vous rappelle qu’à
la différence des caisses des régimes spéciaux ou du régime général, les leurs
sont financées uniquement par leurs adhérents. Non seulement elles ne coûtent
rien à l’État, mais comme l’a dit fort justement Mme Dalloz, elles
contribuent à hauteur de plusieurs dizaines de millions par an à financer le
régime général des retraites. M. le président. La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir le sous-amendement no 42583. Mme Isabelle Valentin. Comme l’a dit mon collègue Éric Diard, je crois qu’il faut vraiment bien faire la différence entre régime spécial et caisse autonome. Ce sous-amendement vise à exclure expressément les professions libérales du système universel prévu par cette réforme. De nombreuses professions libérales, telles que les médecins, les infirmières, les avocats ou encore les pilotes de ligne ont leur propre régime de retraite doté d’une caisse autonome qui prélève des cotisations et les reverse sous forme de pensions à ses retraités. Au nom de l’universalité, ce projet de loi entend les supprimer. Pourtant, ainsi que l’a rappelé ma collègue Marie-Christine Dalloz, la différence est flagrante entre les régimes spéciaux, fortement déficitaires et qui survivent grâce à des subventions publiques, et les caisses autonomes, bénéficiaires et solidaires du régime général. Pourquoi mettre à mal un système qui fonctionne ? Pourquoi punir les bons élèves ? Leurs réserves vont être absorbées pour combler les déficits des autres régimes, ce qui est profondément injuste. Mme Marie-Christine Dalloz. Bravo ! M. Thibault Bazin. Très bien ! M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir le sous-amendement no 42558. M. Marc Le Fur. Monsieur le secrétaire d’État, on a le sentiment que vous utilisez une technique pasquaienne (Mouvements divers sur les bancs des groupes LaREM et MODEM) :… M. Gilles Le Gendre. Holà ! M. Marc Le Fur. …vous êtes acculé, et comme la vieille technique de Pasqua était alors l’embrouille, vous nous embrouillez en mêlant l’ensemble des régimes ! Mes collègues l’ont parfaitement expliqué : le régime spécial est condamnable dans la mesure où son équilibre financier repose sur le soutien des autres, mais si son équilibre repose sur la seule solidarité interne audit régime, cela ne soulève pas de difficultés. Si nous, nous considérons qu’il y a un problème avec la RATP et la SNCF, c’est parce que c’est le citoyen français lambda qui paye. M. Jean-Luc Mélenchon. Cela ne vous dérange pas quand il s’agit des paysans ! M. Marc Le Fur. Mais ce n’est pas le cas du régime des infirmières ou de celui des médecins, lesquels de surcroît ne demandent rien et organisent leur propre système. Pourquoi donc le troubler ? Comme ils ne comprennent pourquoi vous voulez les mêler au système universel alors que leur régime fonctionne, ils se disent : « S’ils le font, c’est qu’ils veulent nous prendre nos réserves. » Plusieurs députés du groupe LR. Eh oui ! M. Marc Le Fur. Je ne vois d’ailleurs pas d’autre explication rationnelle. Vous devriez plutôt consacrer votre énergie, monsieur le secrétaire d’État, à améliorer le système de retraite des agriculteurs et celui des marins,… M. Jean-Luc Mélenchon. Payés par qui ? M. Marc Le Fur. …alors que vous ne le faites absolument pas – le Président de la République a, hélas, déçu les attentes des premiers, et on va au mieux préserver la situation actuelle pour les seconds. Ne condamnez pas des systèmes équilibrés qui fonctionnent sans solliciter la solidarité nationale. Pourquoi agir ainsi, sinon pour tout embrouiller ? C’est une vieille technique que je dénonce ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.) M. le
président. Le sous-amendement no 42561 de
M. Fabrice Brun est défendu. M. Nicolas Turquois, rapporteur. Je ne connaissais pas l’adjectif « pasquaienne », mais je peux vous retourner le compliment, monsieur Le Fur, parce que l’embrouille, c’est vous qui la pratiquez avec vos collègues à force de reprendre tous les sujets dans tous les sens, le sous-amendement de Mme Valentin en étant d’ailleurs une parfaite illustration. Ainsi, l’amendement défendu par M. Diard propose d’insérer l’alinéa suivant : « En sont exclus les régimes mentionnés aux articles L. 640-1 [les professions libérales] et L. 723-1 [les avocats] du code de la sécurité sociale. » Et le sous-amendement de sa collègue propose d’insérer les mots : « les professions libérales »… En clair, cela veut dire qu’en seraient exclues deux fois les professions libérales… Je me demande à quoi sert un travail de parlementaire qui ne fait qu’embrouiller. M. Christian Hutin. C’est insulter une parlementaire que de dire cela ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Ensuite, s’agissant plus précisément des avocats, sous prétexte que leur régime est excédentaire, il ne faudrait pas y toucher. Mais le ratio entre les actifs et les retraités est en train de baisser, passant de cinq à un peu plus de quatre. M. Christian Hutin. Ils ont vingt-cinq ans devant eux ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Leur caisse commence à provisionner des augmentations de taux de cotisation parce qu’il va y avoir, à un moment ou à un autre, des évolutions sociétales, y compris démographiques, et aussi la modification du métier par l’intelligence artificielle, et les équilibres de demain ne seront pas ceux d’aujourd’hui. M. Christian Hutin. On ne sera jamais défendu par des robots ! M. Nicolas
Turquois, rapporteur. Admettons, monsieur Diard, que vous ayez
deux enfants, l’un voulant devenir avocat et l’autre agriculteur : dès leur
entrée dans la vie active, le premier aurait la garantie d’une bonne retraite et
le second la garantie d’une faible retraite. Ce n’est pas logique. C’est comme
si le système éducatif suivi devrait dépendre de la profession des
parents. M. Fabrice Brun. Parlons encore de l’augmentation de leurs cotisations ! M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ? M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. J’ai bien compris que ces sous-amendements sont plus une façon d’exprimer une pensée politique que l’expression d’une volonté d’enrichir le débat. Mais, après l’avoir dit aux députés GDR, je me tourne vers les deux premières travées de cet hémicycle : vous aussi devez avoir envie d’aborder les questions de fond… M. Dominique Potier. Vous touchez le fond, en effet ! M. Laurent
Pietraszewski, secrétaire d’État. …plutôt que d’inscrire deux
fois dans le même alinéa les professions libérales, ce qui me semble manquer
d’intérêt : une seule fois aurait suffi. M. Éric Diard. Non ! M. Laurent
Pietraszewski, secrétaire d’État. Ce n’est pas du tout ma vision
des choses parce que la solidarité nationale vaut quand on anticipe. En tout
cas, ce n’est pas ainsi que je conçois l’intérêt général. Par conséquent, vous
comprenez que le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à ce type
d’amendement. M. Éric Diard et M. Arnaud Viala. C’est déjà le cas ! M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État. …sans que personne n’y trouve rien à redire. Je le dis clairement : la réponse est non. J’estime qu’il faut construire la solidarité et je suis très heureux de présenter, au nom du Gouvernement, un projet qui garantira les mêmes droits familiaux à l’ensemble des Françaises et des Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Mme Isabelle Valentin. Mais non, pas les mêmes droits familiaux ! Vous défendez au contraire un système injuste ! M. le président. La parole est à Mme Coralie Dubost. Mme Coralie Dubost. Que se passe-t-il, mes chers collègues ? J’ai entendu des élus de gauche et de droite tenir sur les avocats des propos qui me laissent penser que nous ne parlons pas de la même chose. Monsieur Diard, l’amendement que vous proposez vise à instaurer des mesures d’économies. Ce n’est pas ce qui fonde notre projet : quand on défend un système universel, c’est pour favoriser l’universalité et la solidarité au sein de la société. M. Éric Diard. Vous vous payez de mots ! Mme Coralie Dubost. Or les avocats sont au cœur de la société, de nos préoccupations et de celles de nos concitoyens. Nous avons une profonde reconnaissance pour leur action. M. Sébastien Leclerc. C’est pour cela que vous voulez doubler leurs cotisations ? Mme Coralie Dubost. Nous savons qu’ils sont dévoués à leur métier et qu’ils sont garants de l’État de droit. C’est précisément pour cette raison qu’il ne faut pas les exclure d’un système de solidarité qui constitue un véritable pacte social – parce que c’est bien un projet de société que nous présentons, et non un projet d’économies. M. Marc Le Fur. Quelle hypocrisie ! M. Éric Diard. Les avocats contribuent à financer le régime général ! Mme Coralie Dubost. J’ai par ailleurs entendu les incompréhensions exprimées par monsieur Bernalicis à propos de l’amendement déposé par le Gouvernement. Rassurez-vous : il a fait l’objet d’un travail avec les députés de la majorité,… M. Ugo Bernalicis. Mais pas avec les avocats ! Mme Coralie
Dubost. …qui se sentent très concernés par le sort des avocats dont le
revenu est inférieur à un PASS. Cet amendement permet aux avocats de transférer
dans le système universel un mécanisme de solidarité qu’ils appliquent
actuellement dans leur caisse autonome. En raison des particularités liées à
leur métier, les avocats avaient en effet – à l’instar, par exemple, des
marins – organisé un système de solidarité interne. M. Marc Le Fur. On ne comprend rien… Mme Coralie Dubost. Une mesure d’économie est donc bien prévue pour garantir la pérennité des petits cabinets, mais ce n’est pas elle qui fonde le projet. M. Dino Cinieri. On n’a rien compris ! Mme Coralie Dubost. Enfin, il faut entendre la colère des avocats, qui est bien réelle : je ne crois pas qu’il soit une seule personne dans cet hémicycle pour nier l’importance prépondérante des avocats. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM et MODEM.) Tout le monde la reconnaît ! M. le président. Veuillez conclure, madame Dubost. Mme Coralie Dubost. Lorsque les avocats nous disent que 40 % des cabinets gagent moins de 40 000 euros par an, ils ne dénoncent pas la réforme, mais bien leurs conditions actuelles d’exercice ! M. Sébastien Leclerc. Vous allez les achever ! Mme Coralie Dubost. C’est parce que rien n’a été fait précédemment que ces conditions existent ! M. Fabrice Brun. Votre projet est suicidaire ! Mme Coralie Dubost. Nous avons demandé au Gouvernement de corriger cette situation,… M. le président. Merci, madame Dubost. Mme Coralie Dubost. …nous y travaillons et nous prendrons des mesures en ce sens, mais pas dans le projet de loi relatif au système de retraite. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) M. Pierre Vatin. C’est n’importe quoi ! M. le président. La parole est à M. Adrien Quatennens. M. Adrien Quatennens. Chers collègues de la majorité, cessez l’obstruction ; elle va finir par se voir. (Protestations sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Vous multipliez les interventions de forme (« Il a raison ! » sur les bancs du groupe LR) pour nous expliquer que vous ne comprenez pas nos explications… M. Alexis Corbière. Il a raison, enfin : il y en a marre de l’obstruction ! M. le président. Mes chers collègues, je préférerais que le débat se déroule dans le calme, l’écoute et le respect mutuel. M. Jean-Paul Dufrègne. On ne s’entend pas, monsieur le président ! M. le président. Pour l’heure, seul M. Quatennens a la parole, et sa parole est libre. M. Adrien
Quatennens. Merci, monsieur le président. C’est donc calmement que je
vous appelle à cesser l’obstruction et les interventions de forme qui ne visent
qu’à nous expliquer que vous ne comprenez pas nos arguments ou à nous accuser de
nous répéter. M. Marc Le Fur. Ça, c’est plutôt Griveaux… Mme Émilie Bonnivard. Quel sexisme, monsieur Quatennens ! (Sourires.) M. Adrien
Quatennens. …la question des retraites a, en réalité, l’avantage de la
simplicité. S’agissant des retraites, il n’y a jamais que deux ou trois
paramètres sur lesquels jouer : l’âge, la durée de cotisation et le niveau
de richesses consacrées aux retraites, qui dépend lui-même des salaires et des
taux de cotisations. Voilà pourquoi le périmètre de notre discussion restera,
somme toute, assez restreint, même si vous tentez de biaiser en utilisant des
éléments de langage qui ne tiennent plus debout. M. Christophe Euzet. Pas vous ! M. Adrien Quatennens. …mais pas à la condition que cet équilibre financier soit assuré uniquement par un allongement de la durée de cotisation des Français ou par un affaiblissement des pensions. M. le président. Veuillez conclure, monsieur Quatennens. M. Adrien Quatennens. Voilà le cœur du débat que nous devons avoir. Le reste n’est que fioriture. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) M. le président. La parole est à M. Arnaud Viala. M. Arnaud
Viala. Je souhaite signaler à M. le rapporteur que nous voulons
discuter du fond. Il ne faudrait pas, toutefois, que vous fassiez semblant de ne
pas comprendre ou que notre collègue Dubost fasse de la provocation à l’endroit
de professions qui ne sont pas habituellement portées à la revendication et qui
ne peuvent pas entendre ce qui vient d’être dit. M. Fabrice Brun. Tout à fait ! M. Arnaud
Viala. Ne faites pas semblant de ne pas comprendre. M. Fabrice Brun. Et au passage, récupérez les 4 milliards de cotisations sur les revenus supérieurs à 120 000 euros ! Voilà qui pourrait servir à compenser les agriculteurs ! M. le président. Merci, monsieur Brun, pour cette intervention. La parole est toutefois à M. Erwan Balanant. M. Erwan Balanant. Je voulais répondre sur le fond à certaines affirmations concernant les avocats et notamment à M. Hutin, qui affirmait qu’ils allaient voir leurs cotisations doubler. M. Christian Hutin. Oui ! M. Erwan Balanant. Ce n’est pas tout à fait vrai. M. Jérôme Lambert. À peu près, tout de même… M. Erwan Balanant. La réalité est un peu plus complexe. M. Fabien Roussel. Ah, la pensée complexe de la majorité… M. Erwan Balanant. Elle a d’ailleurs été assez bien expliquée aux avocats au cours des négociations. Un processus de transition lissée dans le temps leur a d’ailleurs été proposé à cette occasion. M. Christian Hutin. Quand on passe de 14 à 28 % de cotisations, selon moi, on multiplie par deux – mais il est vrai que je n’ai eu que six sur vingt en mathématiques au baccalauréat… M. Erwan Balanant. Puis-je tenter de vous expliquer, afin que nous débattions un peu du fond du sujet ? Aujourd’hui, vous le savez, la CNBF, qui gère la retraite des avocats, a déjà provisionné une augmentation des taux de cotisation de deux points,… M. Ugo Bernalicis. En application du code de la sécurité sociale ! M. Erwan
Balanant. …afin de continuer à assurer l’équilibre du régime malgré les
évolutions démographiques à venir. M. Ugo Bernalicis. Ah ! Voilà ! M. Fabien Roussel. Combien ? M. Erwan Balanant. Une partie infime. M. Ugo Bernalicis. On voit que ce ne sont pas vos sous ! M. Erwan Balanant. Monsieur Bernalicis, le programme de La France insoumise prévoit de faire complètement les poches au régime des avocats, c’est inscrit noir sur blanc, page 31 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Mme Cendra Motin. C’est ça, la vérité ! M. Erwan Balanant. Monsieur Hutin, les avocats – que vous, moi et à peu près tous les députés ici présents avons rencontrés –, éprouvent une crainte vis-à-vis de la réforme que nous défendons. Nous devons la leur expliquer,… M. Jérôme Lambert. Ils n’ont rien compris, quoi ! M. Erwan Balanant. …car tous les éléments relatifs à leur future retraite ne leur ont pas été transmis. Ils me l’ont dit. M. Pierre Vatin. Tout va bien, ce sont les avocats qui n’ont rien compris ! M. Jérôme Lambert. Ils sont sans doute trop bêtes… M. Erwan Balanant. Mais nous devons également prendre en considération la réalité actuelle du travail des avocats et de leur statut. Nous devons y travailler collectivement, parce qu’ils se posent des questions. M. Pierre Vatin. Que ne les avez-vous éclairés plus tôt ! M. Erwan
Balanant. Nous devons mener ce chantier. M. le président. Merci de conclure, monsieur Balanant. M. Erwan Balanant. Aujourd’hui, un avocat peut exercer pendant dix ans à son compte puis décider un jour de devenir salarié. M. Pierre Vatin. Avez-vous déjà vu un avocat quitter la robe ? M. Erwan Balanant. Dans le système actuel, il perdrait alors le bénéfice de ses dix années de cotisation auprès de la CNBF. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe MODEM.) M. le président. La parole est à M. Fabien Roussel. M. Fabien
Roussel. Je me réjouis que les députés de la majorité prennent la parole
pour défendre leur projet : cela nous permet de les interpeller sur le sens
de cette réforme. M. Bruno Questel. C’est 40 ans, point ! M. Fabien
Roussel. …ou est-ce d’imposer à tout le monde de partir à 62 ans,
après 40 ans de boulot ? M. Christophe Euzet. Arrêtez, enfin ! M. Fabien Roussel. Nous ne ferons jamais un tel choix : nous défendrons toujours les travailleurs et les salariés qui étaient protégés, quand vous défendrez les patrons et les actionnaires. Voilà la différence entre nous ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI. – Protestations sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) M. Jean-Luc Mélenchon. Bravo ! M. le président. Chers collègues, je vous invite à accueillir les interventions des uns et des autres dans le silence et le respect. M. Fabien Roussel. Répondez, si vous n’êtes pas d’accord ! M. le président. La parole est à M. Hervé Saulignac. M. Hervé Saulignac. À ce stade de nos débats, je me demande s’il ne serait pas préférable que personne ne nous écoute ni ne nous regarde. Je crois en effet que nous avons atteint le paroxysme du dialogue de sourd et de la mauvaise foi. Mme Cendra Motin. C’est vrai ! M. Hervé Saulignac. Une de collègues de la majorité disait tout à l’heure ne plus rien y comprendre. Si les députés de la majorité eux-mêmes n’y comprennent plus rien, cela commence à devenir inquiétant. M. Fabrice Brun. Ils n’y ont jamais rien compris ! M. Sylvain Maillard. Elle voulait dire qu’elle ne comprenait plus rien à ce que vous défendez ! M. Hervé Saulignac. Notre collègue Le Fur a parfaitement résumé la situation lorsqu’il a évoqué votre stratégie « pasquaienne » : vous vous employez à ce que personne ne comprenne plus rien. Mais nous comprenons très bien ! M. Bruno Studer. Ah… M. Christophe Arend. Nous allons pouvoir avancer, alors ! M. Hervé
Saulignac. Nous comprenons que vous ne savez pas du tout où vous allez.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle vous souhaitez y aller très vite :
parce que votre désorientation va finir par se remarquer. M. Alexis Corbière. Pas du tout ! M. Hervé Saulignac. Je dirai, pour ma part, que vous pratiquez la diversion. Vous y êtes forcés parce qu’en réalité, vous-mêmes ne pouvez pas prétendre maîtriser ce texte, chers collègues de la majorité : avec vingt-neuf trous,… M. Brahim Hammouche. Vingt-neuf ordonnances, pas vingt-neuf trous ! M. Hervé
Saulignac. …et une étude d’impact absolument indigente, vous ne pouvez
pas savoir où vous allez ! (Applaudissements sur les bancs des groupes
GDR et FI. – Mme Valérie Bazin-Malgras
applaudit également.) Mme Valérie Bazin-Malgras. Bravo ! M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle. (« Ah ! » sur divers bancs.) M. Jean
Lassalle. Je profite à la fois d’un moment de calme relatif au sein de
notre assemblée – contrairement à ce que pensent certains, il me semble
qu’on se dit plus de choses depuis une heure qu’on ne s’en est dites depuis
quelque temps – et du fait d’être le seul de mon groupe pour
intervenir. M. Marc Le Fur. Il est très bien, le président ! M. Jean
Lassalle. Comme j’ai tenté de l’expliquer l’autre jour – j’ai
peut-être été mal compris, mais il est vrai que je n’étais pas très en forme
(Sourires) –, si certains dénoncent aujourd’hui
l’obstruction, j’ai vécu ici, avec d’autres, des séances durant lesquelles
Mme Boutin – je dis bien « Boutin » et non « Autain » –
lisait des versets de la Bible pendant une heure à la tribune, juste avant que
Mme Bachelot nous relate la Cène du Christ pendant trois quarts d’heure.
(Sourires sur les bancs GDR et FI.) L’obstruction ne date donc pas
d’aujourd’hui – d’autant qu’à l’époque, les temps de parole des groupes
n’étaient même pas limités. Certains voulaient déjà voir les débats aboutir
tandis que les autres souhaitaient le contraire. M. le président. Merci, monsieur Lassalle. J’ai moi aussi vu beaucoup de choses dans vos yeux… (Sourires.) (Le sous-amendement no 42583 n’est pas adopté.) (Les sous-amendements identiques nos 42558 et 42561 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 23428 n’est pas adopté.) M. le
président. Sur l’amendement no 23429, qui fait l’objet
de plusieurs sous-amendements, je suis saisi par le groupe Les Républicains
d’une demande de scrutin public. M. Éric Diard. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise toujours à défendre les caisses autonomes des professions médicales – pharmaciens, sages-femmes, médecins. Monsieur le secrétaire d’État, je crains qu’avec votre réforme, on ne ponctionne plus encore ces professions en augmentant leurs cotisations, et que cela accélère la désertification médicale dans les zones rurales. M. Pierre Cordier. Il a raison. M. Éric Diard. C’est donc pour des raisons de justice que je défends le maintien des caisses autonomes des professions médicales. M. le
président. Je suis saisi de deux sous-amendements identiques,
nos 42559 et 42562. M. Marc Le Fur. Je souscris totalement aux propos de mon collègue Éric Diard. Vous nous dites que les caisses autonomes conserveront leur argent et pourront l’utiliser, mais à ce stade, monsieur le secrétaire d’État, je voudrais des précisions : où les caisses autonomes pourront-elles déposer leur argent ? Conserveront-elles la personnalité morale ? Je m’interroge aussi sur l’utilisation de cet argent : les caisses pourront-elles l’allouer librement à leurs membres, en supplément du système universel ? M. Jean-Paul Dufrègne. Bonne question ! M. Marc Le Fur. Il faudra bien qu’ils en fassent quelque chose, même si ma crainte est que, d’une manière ou d’une autre, vous utilisiez cet argent pour compenser les difficultés rencontrées par le fameux système universel. M. Christian Hutin. Qui n’est pas universel ! M. Marc Le Fur. Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d’État, des précisions sur les points suivants : les caisses autonomes existeront-elles toujours demain ? Conserveront-elles la personnalité morale ? Disposeront-elles d’un compte qu’elles géreront elles-mêmes, sans intervention extérieure ? Leur argent découle des cotisations passées : de quel degré de liberté disposeront-elles dans son utilisation ? Comment sera-t-il restitué non pas au grand système que vous imaginez, mais précisément à ceux et celles qui ont constitué ces réserves financières ? M. le président. La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir le sous-amendement no 42562. M. Fabrice Brun. En complément des propos d’Éric de Diard et Marc Le Fur, j’ajouterai un mot sur les professionnels de santé – médecins, infirmières libérales. Ils font un travail remarquable, notamment dans les zones de revitalisation rurale et les zones d’intervention prioritaire classées par les agences régionales de santé, et jouent donc un rôle essentiel pour réduire la fracture médicale : en légiférant sur ce texte, c’est aussi à eux et à elles qu’il faut penser ! M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et les deux sous-amendements identiques ? M. Nicolas Turquois, rapporteur. Je voudrais d’abord réagir aux propos de notre collègue Jean Lassalle, car je crois qu’il a raison : tout le monde, ici, a l’impression de livrer des combats importants, mais nous ne nous parlons jamais qu’à nous-mêmes. M. Jean-Paul Dufrègne. C’est vous qui ne vous parlez qu’à vous-même ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Les Français, en voyant notre mode de fonctionnement, se demandent si nous sommes des extraterrestres ! On se livre des combats homériques sur des mots – « universel »,… M. Pierre Vatin. C’est vous qui employez ce terme ! M. Nicolas
Turquois, rapporteur. …« équitable » – mais, pour
ceux qui sont à l’extérieur, le Parlement ne sert à rien !
(Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM. –
M. François Ruffin s’exclame.) M. Marc Le Fur. Je vous ai posé des questions précises ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Je vais y répondre ! Je vous assure que plutôt que de revenir sur tous les sujets, amendement après amendement, on gagnerait beaucoup à travailler sur le fond, article par article. M. Jean-Luc Mélenchon. Nous disons ce que nous voulons ! M. Jean-Paul Dufrègne. Vos propos sont scandaleux ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Certes, en tant que rapporteur, on m’interpelle beaucoup, ce qui va faire exploser mes statistiques sur nosdeputes.fr :… M. Christian Hutin. Ça ne marche plus, ça ! Moins on parle, mieux on est élu ! M. Nicolas
Turquois, rapporteur. …je vais me faire plaisir ! Mais, sur
le plan démocratique et eu égard au rôle du député, cela ne sert à rien !
Telle est la réalité. M. Éric Diard. Je n’ai pas dit cela ! J’ai dit que cela accélérait la désertification médicale. M. Nicolas Turquois, rapporteur. Aujourd’hui, on voit bien que… (Mêmes mouvements.) J’aimerais que vous me laissiez m’exprimer, comme vous avez vous-même pu le faire ! Aujourd’hui, la désertification médicale est une réalité qui, en fonction des politiques qui sont menées, diffère suivant les territoires. M. Christian Hutin. Allons sur le fond de l’amendement ! Là, ce n’est pas sérieux ! M. Nicolas Turquois, rapporteur. Même s’il s’agit d’une problématique sur laquelle nous devons travailler, elle n’a rien à voir avec le projet de réforme des retraites qui nous occupe. M. Fabrice Brun. C’est l’attractivité de ces métiers qui est en jeu ! M. Nicolas
Turquois, rapporteur. S’agissant de la question précise de
M. Le Fur, les réserves appartiennent et sont gérées par les caisses. Elles
pourront en faire « ce qu’elles veulent » : si elles souhaitent
faciliter la transition des personnels concernés, elles le peuvent ! Si
elles souhaitent prendre partiellement en charge l’augmentation des cotisations,
elles le peuvent ! Comme cela est inscrit à l’article 50 du projet de
loi, les caisses restent gestionnaires des réserves que leur régime a
constituées. Par exemple, les réserves de la caisse des avocats ou, en supposant
qu’elle en ait, de la caisse autonome de retraite et de prévoyance des
infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, orthophonistes et
orthoptistes – la CARPIMKO – restent de la responsabilité de ces
caisses. M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ? M. Laurent
Pietraszewski, secrétaire d’État. Je répète les propos que j’ai
déjà tenus en réponse à M. Door : les caisses de retraites des
professions de santé pourront continuer à fournir des prestations dans le cadre
d’une délégation de service de la Caisse nationale de retraite universelle. Cela
leur permettra notamment de rester l’interlocuteur unique de certaines
professions, et c’est donc une bonne idée. Par ailleurs, je vous confirme
qu’elles pourront garder la personnalité morale. M. Thibault Bazin. Vous ne pouvez pas faire ce que vous envisagez, monsieur le secrétaire d’État ! C’est inconstitutionnel ! M. Laurent
Pietraszewski, secrétaire d’État. Si les caisses décident de
lisser une éventuelle hausse des cotisations, ce sera leur choix, il relèvera de
la responsabilité de leur conseil d’administration – d’autant que toutes
les professions ne connaîtront pas de hausse des cotisations. M. le président. La parole est à M. Éric Diard. M. Éric Diard. Monsieur le secrétaire d’État, vous ne pouvez pas évacuer en une heure la question des caisses autonomes puis dire : c’est fait ! C’est du mépris. M. Sylvain Maillard. Mais non ! S’il ne répond pas, vous n’êtes pas contents ; lorsqu’il répond, vous n’êtes pas contents non plus ! M. Éric
Diard. Si, je vous le dis : c’est du mépris pour ces professions.
Vous ne pouvez pas balayer la question d’un revers de main. M. Marc Le Fur. Et la Banque de France ? M. le président. La parole est à M. Fabien Roussel. M. Fabien
Roussel. Une fois n’est pas coutume, les députés communistes
soutiendront l’amendement de leurs collègues Républicains, parce que oui, votre
réforme des retraites entraînera des conséquences graves pour toutes les
professions médicales – notamment les auxiliaires de santé, les kinés, les
infirmières, les orthophonistes, etc., qui avaient leur propre caisse autonome,
la CARPIMKO. M. le président. La parole est à M. Julien Borowczyk. M. Julien Borowczyk. On a parlé, tout à l’heure du nombre de régime : y en a-t-il vraiment quarante-deux, ou pas ? Je vais vous dire : s’il ne devait en rester que deux, ce serait déjà un de trop ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) M. Hervé Saulignac. Cinq ! Vous créez cinq régimes ! M. Julien Borowczyk. Nous voulons créer un régime véritablement universel, solidaire et équitable. (Mêmes mouvements.) Je reviendrai plus tard sur le sujet des professions libérales, en particulier médicales ; mais arrêtons de mentir aux Français ! (« Ah ! Enfin !» et vifs applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR et FI.) M. Ugo Bernalicis. Il était temps ! (Sourires.) M. Julien
Borowczyk. Arrêtez ! M. Éric Diard. Et chez les infirmières ? Et chez les aides-soignants ? M. Julien
Borowczyk. …parce que le système actuel incite déjà beaucoup à se
tourner vers la capitalisation, dès un niveau bien en dessous du seuil de trois
PASS ; parce qu’elle offre de formidables avancées, en particulier pour les
femmes, qui sont nombreuses en médecine ; parce qu’on ne pique pas dans les
réserves des médecins ; parce qu’elle permet de proposer un âge de départ à
la retraite bien plus précoce qu’aujourd’hui ! M. Pierre Vatin. Monsieur le président, laisserez-vous faire cela ? M. Julien Borowczyk. Mais ce qui m’inquiète le plus, c’est que, toujours sur la première page de ce site, il est proposé aux Français de commander des autocollants « La retraite en moins »… Mme Mathilde Panot. Oui ! La retraite en moins ! M. le président. Merci de conclure, cher collègue. M. Julien
Borowczyk. …et de « débusquer » les candidats macronistes en
allant les coller sur leurs permanences. M. le président. Merci, monsieur Borowczyk. M. Jean-Luc Mélenchon. Cela va nous faire une jolie vidéo ! M. le
président. La parole est à M. François Ruffin. (Exclamations sur
divers bancs. – M. Bruno Studer et
Mme Mathilde Panot s’interpellent
vivement.) M. François Ruffin. Le rapporteur a l’air de découvrir que la démocratie s’exerce pour le moins imparfaitement ici, voire de façon absurde. Et c’est vrai ! (Brouhaha persistant.) Mme Brigitte Bourguignon, présidente de la commission spéciale. Ce n’est pas ça, la démocratie ! M. le
président. Un peu de calme mes chers collègues, s’il vous plaît. Madame
Panot, il semble que vous dérangez M. Ruffin, et vous n’êtes pas la
seule. M. François Ruffin. Mais qu’est-ce qu’on fait ici ? (« Ah ! » sur les bancs du groupe LaREM.) M. Thibault Bazin. Pourrions-nous plutôt discuter du sujet des amendements ? M. François Ruffin. Vous semblez ne découvrir qu’aujourd’hui l’absurdité du fonctionnement de ce parlement, monsieur le rapporteur. Mais moi, je la vis depuis trois ans maintenant ! (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) M. Alain Perea. N’hésitez pas ! Démissionnez ! M. François Ruffin. Le constitutionnaliste Jean-Claude Colliard disait : « Il est […] devenu faux de dire que le Parlement "fait" la loi. […] les cabinets préparent les projets. Il serait donc plus juste d’affirmer que, désormais, le Parlement "vote" la loi. » Il ajoute que ce que nous vivons aujourd’hui, c’est « le temps de l’habillage démocratique » : une fois qu’une décision technique est prise, il faut lui donner une sanction politique, un habillage démocratique – et c’est le temps du Parlement ! C’est le moment où nous devons faire semblant, ici, de croire que nos amendements ont des chances de passer. Mme Sandra Marsaud. C’est vous qui faites semblant ! M. François Ruffin. Tout le monde le sait ! Les députés de droite savent que leurs amendements n’ont aucune chance de passer ! Au sein du groupe La France insoumise, nous le savons aussi ! Les députés communistes le savent aussi ! Car ainsi le veut le fonctionnement de la Ve République, qui assure dans l’hémicycle une majorité pléthorique et automatique ! (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) Mme Fadila Khattabi. Hors sujet ! M. Thibault Bazin. Pourrait-on aborder le sujet des amendements ? M. François Ruffin. Que reste-t-il à faire ? On le constate aussi avec ce projet de réforme des retraites…(Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LaREM.) M. le
président. Merci, monsieur Ruffin. M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. M.
Jean-Paul Mattei. La répétition des sujets présente un avantage :
lorsque l’on absente une journée, comme ce fut mon cas hier, on n’est pas perdu
à son retour ! C’est ce qui est agréable ! (Sourires et
applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.) M. François Ruffin. Mais oui ! Tout ça, c’est du flan ! M.
Jean-Paul Mattei. Ce n’est pas mon cas ! Je n’ai pas été élu député
pour cela. M. Fabien Roussel. L’amendement évoque les caisses autonomes ! M. Jean-Paul Mattei. J’aimerais revenir sur le sujet des professions médicales. Il se trouve que j’ai trente ans d’expérience. M. Jean-Luc Mélenchon. En tant que notaire ! M. Jean-Paul Mattei. Excusez-moi, monsieur Mélenchon, je n’ai pas trente ans d’expérience dans la vie politique… M. Jean-Luc Mélenchon. Cela s’entend quand vous prenez la parole ! M. Jean-Paul Mattei. …mais dans la vie civile. (Applaudissements sur bancs des groupes MODEM et LaREM. – Exclamations sur les bancs des groupes LR et FI.) Cela étant, à chacun son parcours ! M. Pierre Cordier. Ce débat ne concerne pas l’article 2 ! M. Thibault Bazin. Peut-on parler de l’article 2 ? M. Jean-Paul Mattei. J’ai côtoyé de nombreuses personnes exerçant des professions libérales, beaucoup de médecins et d’infirmières. La lecture de leurs bilans ou de leurs déclarations de bénéfices non-commerciaux démontre que ces professionnels rencontrent des problèmes liés à la constitution de sociétés civiles de moyens, à l’organisation de leur profession, aux remplacements. En milieu rural, ils souffrent de solitude. Parmi ces problèmes, la retraite n’est pas souvent citée. Le fait de leur permettre de dépendre d’un système universel, qui leur offre une meilleure vision de leur situation, est un élément positif. Nous donnons de la visibilité. M. Christian Hutin. Ah, ils sont contents ! Ils nagent dans le bonheur ! M. Fabien Roussel. Pourquoi sont-ils dans la rue alors ? M. le président. Monsieur Roussel, vous vous êtes déjà exprimé. M. Jean-Paul Mattei. Il est normal, bien sûr, de vouloir discuter de la période de transition. Mais pour l’instant, il est impossible de travailler, tant le débat est parasité par des amendements qui n’ont rien à voir avec le fond du texte. Pardonnez-moi ce propos désagréable, mais nous avons déjà fait preuve de beaucoup de patience ! (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.) M. Brahim Hammouche. Bravo ! M. Fabien Roussel. C’était une intervention pour rien ! M. le président. La parole est à M. Christian Hutin. M. Christian Hutin. Une tribune du bâtonnier de Paris, Olivier Cousi, publiée dans l’édition d’aujourd’hui du journal Le Monde, permet d’expliquer la situation. Il dit notamment : « [les avocats] doivent être des lanceurs d’alerte lorsque la fabrication de la loi est hâtive ou bâclée, comme nous l’avons encore démontré pour ce projet de système universel ». Il demande aussi : « Qu’ont fait les avocats pour mériter un tel mépris ? » M. Pierre Dharréville. En effet ! C’est injuste ! M.
Christian Hutin. J’ajouterais pour ma part : qu’ont fait l’ensemble
de ces professions pour mériter un tel mépris ? Qu’on fait ces
sages-femmes, ces orthophonistes, ces infirmiers, ces infirmiers de bloc
opératoire ? Comment se fait-il, alors que nous discutons de sujets si
importants, que les ministres de la justice et de la santé ne soient pas
présents ? M. Jean-René Cazeneuve. C’est faux ! M. Christian Hutin. De notre côté, nous recevons tous les jours des représentants de ces professions ! Qu’ont-ils tous fait pour subir un tel mépris de la part du Gouvernement ? Rappel au règlementM. le président. La parole est à M. Alexis Corbière, pour un rappel au règlement. M. Alexis Corbière. Il se fonde sur l’article 100 de notre règlement. Il vous incombe, monsieur le président, de veiller à la clarté des débats. Or notre collègue Borowczyk a fait éclater une vérité indiscutable : il ne sait pas consulter le site internet de La France Insoumise ! M. le président. Monsieur Corbière, la consultation du site de La France insoumise n’est pas mentionnée dans le règlement de l’Assemblée nationale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe FI.) M. Alexis Corbière. Monsieur le président, notre collègue a longuement pris la parole – sans doute avec une volonté d’obstruction que je déplore (Sourires sur les bancs du groupe FI) – pour laisser entendre que, parce qu’il nous aurait mouchés et mis nos arguments à nu, nous aurions immédiatement retiré notre programme du site de la France insoumise. Pas de chance, cher collègue, il y est toujours ! (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) Mme Perrine Goulet. Ce n’est pas un rappel au règlement ! M. Alexis Corbière. Vous avez donc fait éclater une vérité : politiquement, vous n’êtes déjà pas très adroits, mais en matière de technologie non plus ! C’est dommage ! Nous disposons aussi notre programme en version papier ; vous serez plus à l’aise pour le lire ! (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) M. le président. Un peu de calme, mes chers collègues. M. Alexis Corbière. Plus sérieusement, je sais que vous aimez la polémique, mais nous n’avons jamais demandé que les permanences de La République en marche soient recouvertes de quoi que ce soit. Je vous le dis ! (Protestations sur les bancs du groupe LaREM.) Un député du groupe LaREM. Et pourtant, c’est le cas ! M. Alexis Corbière. Pour la clarté des débats, nous vous offrons une traduction… (Protestations continues sur les bancs du groupe LaREM.) Restez calmes ! M. le président. Mes chers collègues, nous avons à discuter, au cours de plusieurs séances – et celle-ci est, dans ce contexte, la première que je préside –,… M. Christian Hutin. Très bien, d’ailleurs ! M. le président. …d’un sujet important pour les Français. Certains, dans cet hémicycle, soutiennent la réforme, quand d’autres s’y opposent. M. Jean-Luc Mélenchon. Quelle perspicacité ! M. le président. Il n’est pas nouveau que l’opposition s’oppose, ni que la majorité soutienne un projet du Gouvernement. Mme Mathilde Panot. Bravo ! M. le
président. Je vous demande simplement de le faire dans le plus grand
respect mutuel, car il y va de l’image de l’institution, celle que nous donnons
collectivement aux Français qui nous regardent. (Applaudissements sur les
bancs des groupes LaREM et MODEM. – Mme Émilie Bonnivard et
M. Jean Lassalle applaudissent également.) M. Alexis
Corbière. Je voulais faire un clin d’œil, monsieur le président,
car si vous présidez pour la première fois une séance consacrée à la réforme des
retraites, notre collègue, lui, a déjà évoqué plusieurs fois le programme de La
France insoumise. Je ne le lui reproche pas, mais tenais à souligner le fait
qu’il s’était lourdement trompé. Cela peut arriver, ce n’est pas
grave ! M. le président. Veuillez conclure. M. Alexis Corbière. Si vous êtes blessés parfois par des reproches que vous subissez, laissez-moi vous dire que, pour ce qui concerne les militants de votre parti, les immondices, les calomnies… M. le président. Merci monsieur Corbière, votre temps de parole est écoulé. Article 2 (suite)(Les sous-amendements identiques nos 42559 et 42562 ne sont pas adoptés.) M. le président. Je mets aux voix l’amendement no 23429. (Il est procédé au scrutin.) M. le
président. Voici le résultat du
scrutin : (L’amendement no 23429 n’est pas adopté.) Rappel au règlementM. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour un rappel au règlement. M. Jean-Luc
Mélenchon. Ce rappel sur le fondement de l’article 58,
alinéa 1, du règlement. J’ai en effet été interpellé personnellement par
quelqu’un que j’estime, M. Mattei. Un député du groupe LaREM. L’heure de la retraite a sonné ! M. Jean-Luc
Mélenchon. L’heure de la retraite… on verra ! Il est à craindre
qu’il n’y en ait jamais, car lorsqu’on est engagé pour une cause, on la défend
jusqu’à son dernier souffle, comme l’ont fait tous mes camarades
jusqu’ici ! Cela mérite d’être dit ! Il y a aussi des militants dans
cette salle, pas uniquement des gens qui ne sont là que pour les
circonstances. Un député du groupe LaREM. Et pourtant, c’est le cas ! M. Jean-Luc Mélenchon. Oui, vous avez raison, c’est effectivement le cas. Notre collègue Caroline Fiat a également vu ses locaux dégradés, de même que plusieurs d’entre nous. Plusieurs députés du groupe LaREM. Et nous aussi ! M. Jean-Luc
Mélenchon. Nous n’appelons donc pas à de tels actes. M. le
président. Merci monsieur Mélenchon. Vous avez obtenu la parole pour
fait personnel, puis vous avez débordé sur le fond. Considérons que cela ne se
renouvellera pas !
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